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Le collier des jours

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LVIII

Je fus vite accoutumée à cette vie libre, animée et irrégulière, si différente de celle que je quittais. Ma mère allait souvent aux répétitions du Théâtre-Italien, et la gentille Marianne, au baragouin si drôle, était chargée de nous garder, ma sœur et moi. Mais mon père, qui terminait Le Roman de la Momie, restait à la maison et je me tenais le plus que je pouvais près de lui. Très curieux l'un de l'autre, nous faisions tout doucement connaissance. Il portait alors les cheveux très longs et soignait beaucoup sa barbe, très légère, qu'il avait laissé pousser, je crois, depuis peu de temps.

J'aimais beaucoup le son de sa voix, et sa façon de s'exprimer, qui me paraissait si extraordinaire. Je l'écoutais, en le regardant de tous mes yeux; ces phrases tonnantes, ces mots excessifs, me faisaient croire, d'abord, qu'il était fâché; puis, voyant qu'il souriait, je riais aussi, tant c'était amusant. Il ne cherchait pas du tout à prendre l'attitude d'un père solennel, qui veut en imposer à ses enfants et les tenir à distance respectueuse. Sa plus grande crainte, au contraire, était de voir ces jeunes esprits se fermer devant lui, dans une méfiance peureuse; il voulait les pénétrer et les connaître à fond, devenir, autant que possible, le camarade de ses enfants. Mais pour cela, fallait-il encore qu'ils ne fussent pas trop petits, et, je crois qu'il n'a commencé à s'intéresser vraiment à nous, que quand nous existions déjà un peu par le cerveau.

L'appartement était vaste et commode; cependant, il avait fallu se serrer un peu pour me faire place. Mon père renonça à son cabinet de travail dans lequel nous fûmes installées, ma sœur et moi. C'était une pièce étroite et longue, donnant sur la cour, à côté de la salle à manger.

Le salon avait trois portes-fenêtres, ouvrant sur la terrasse; la chambre de ma mère était à gauche, celle de mon père à droite; mais, quand j'arrivai à la maison, le salon était encombré par de grandes planches posées sur des tréteaux, qui barraient deux des fenêtres et sur lesquelles s'entassaient d'énormes volumes illustrés, dont mon père avait besoin pour ses études égyptiennes.

Malgré la difficulté du travail et les minutieuses recherches archéologiques, qu'exigeait presque chaque page, Le Roman de la Momie paraissait en feuilleton, à mesure qu'il était écrit. Mon père n'avait naturellement que fort peu d'avance et devait se hâter, pour ne pas se laisser dépasser par les imprimeurs. Ces recherches, à travers ces in-folios à planches mobiles, qui s'embrouillaient vite et se perdaient, lui faisaient dépenser un temps précieux, il devait se lever à chaque moment, feuilleter, chercher, et il s'impatientait à ce manège, d'autant plus que ces livres ne lui appartenaient pas; ils lui avaient été prêtés par Ernest Feydeau, et il avait très peur de les abîmer.

Un jour, qu'il était plus impatienté encore que de coutume, il me fit venir, et me demanda si je me sentais capable, pour lui rendre service, de rester tranquille pendant quelques heures, afin de l'aider dans son travail. Très flattée d'être appelée à de si hautes fonctions, je m'engageai, sans hésiter, à être très sage. Se fiant à ma promesse, il m'installa sur la table même, et je fus chargée de lui passer les planches, à mesure qu'il en avait besoin, puis de les reprendre et de les remettre en ordre.

Son installation à lui était des plus simples; un gros livre, appuyé sur un plus petit, formait son pupitre, et, de son écriture régulière et fine, il couvrait de lignes très droites des feuilles de papier à lettres, dans le sens le plus large.

Tandis qu'il écrivait, je regardais ces étonnantes images, où les personnes avaient des têtes d'animaux, d'incroyables coiffures cornues et des poses si singulières. J'étais tellement fascinée par l'apparition de ce monde mystérieux, paré de si brillantes couleurs, accompagné d'hiéroglyphes qui étaient d'autres images, que je me tins fort tranquille, et fus maintenue en fonctions plusieurs jours de suite.

LIX

Notre éducation, il faut l'avouer, était plutôt négligée; on n'avait pas le temps de s'en occuper; on l'oubliait, et cela ne nous gênait guère. Ma sœur et moi, nous savions très bien remplir les heures et la journée agréablement, à ne rien faire, quand Marianne ne nous emmenait pas jouer devant le théâtre du Gymnase, avec des camarades de rencontre.

Et puis, il y avait les livres.

Mon père disait souvent, que la chose qui le surprenait le plus, c'est qu'un enfant pût apprendre à lire. La lecture conquise, il lui semblait que le reste n'était rien; il n'y avait plus qu'à lire. Mais, pour cela, il fallait des livres; aussi trouvait-il absurdes ces défenses et ces restrictions qui verrouillent les bibliothèques, sous prétexte qu'il y a des livres dangereux. Lesquels? Il jugeait bien audacieux de décider de cela. A son avis, pour éviter le danger il fallait les lire tous, ou n'en lire aucun. Paul et Virginie lui paraissait être le livre le plus dangereux qui fût au monde, pour de jeunes imaginations. Il se souvenait de l'émotion brûlante qu'il avait éprouvée, lui-même, en le lisant, et qui n'avait été égalée, plus tard, par aucune autre impression de lecture.

Donc, la bibliothèque était ouverte devant nous, et, comme aucune défense n'en barrait l'approche, nous étions, peut-être, moins curieuses d'y fouiller.

Un jour, cependant, après avoir longtemps considéré les titres, je m'emparai d'un volume: c'était Le Rouge et le Noir, de Stendhal. Je n'avais pas choisi sans réflexion, ce titre me semblait devoir annoncer l'histoire de deux diablotins, l'un rouge et l'autre noir, et cela promettait d'être amusant. Je fus un peu déçue par les premiers chapitres, mais, sans être rebutée, et je poursuivis ma lecture, sans enthousiasme, mais sans ennui. Un passage du livre me troubla spécialement, celui où l'héroïne de la première partie, dans ses remords d'avoir trompé son mari, attribue à sa faute la maladie de ses enfants. Tromper son mari ne me représentait rien de particulier, mais j'étais surprise au dernier point, d'apprendre que cette chose inconnue rendait les enfants malades. Je me disais, non sans inquiétude:

«Quand nous serons malades, je saurai maintenant pourquoi.» On m'offrit d'échanger ce livre, trop fort pour moi, disait-on, contre un autre, intitulé: La Fée aux Roses, qui me parut beaucoup plus amusant, mais laissa, cependant, bien moins de traces dans ma mémoire.

Marianne, qui parlait si mal le français, était, malgré cela, beaucoup plus cultivée que les Françaises, en général, même celles au-dessus de sa condition. Elle avait une âme romanesque et éprouvait une respectueuse et naïve admiration pour l'art et pour les artistes. Quand c'était à Meyerbeer, à Banville, à Flaubert ou à Baudelaire qu'elle ouvrait la porte, elle avait un sourire extasié et, en les annonçant, sa voix sonnait comme une fanfare joyeuse. En faisant le lit, elle s'attardait à lire le feuilleton de son maître, et on se serait bien gardé de la gronder pour cela. Aussi se laissait-elle aller à sa passion pour la lecture; tandis qu'elle cousait dans la salle à manger, elle me suppliait, s'il n'y avait personne, de lui lire un peu à haute voix. Mais c'était le dimanche, que nous prolongions, pour lire, la soirée plus qu'il ne fallait. Ce jour-là, mon père et ma mère dînaient toujours chez une belle et joyeuse dame que l'on avait surnommée: La Présidente, et qui savait retenir autour d'elle tous les artistes illustres de l'époque. Nous restions donc seules avec Marianne, la cuisinière ayant congé. Malgré nos protestations, le plat principal de notre dîner était toujours une soupière pleine de riz au lait, que nous détestions; je ne sais pourquoi, ma mère y tenait spécialement et ne s'en allait que quand nous étions assises à table devant nos assiettes garnies de cette pâtée gluante. Dès que nous jugions nos parents assez loin, nous courions à la cuisine, par le long couloir qui y conduisait, et nous nous acharnions à faire passer tout le riz au lait par le trou de l'évier, ce qui était laborieux; mais cela représentait une espèce de vengeance contre le mets détesté. Marianne nous confectionnait quelques beignets subreptices et, aussitôt le dîner fini, allait chercher un livre. C'était elle qui le choisissait. Les romans de George Sand avaient ses préférences, ils l'attendrissaient au dernier point. Valentine surtout lui fit verser d'abondantes larmes. Et c'est ainsi que, pour faire plaisir à cette douce et sentimentale Alsacienne, j'ai lu, avant le temps, toute l'œuvre de la grande Française.

LX

Bien que, depuis ma sortie du couvent, l'on fût un peu en froid avec la tante Carlotta et la grand'maman Grisi, ma mère n'avait pas cessé de considérer la danse comme ce qu'il y avait de plus beau au monde, comme la seule carrière capable de conduire, par bonds rapides, à la fortune, et elle mûrissait, secrètement, un plan admirable: c'était de faire de nous des danseuses!

Mon père était hostile à ce projet; mais, comme il détestait les discussions, il n'osait pas le dire franchement, répondait évasivement, gagnant du temps. On revenait à la charge: il ne fallait pas attendre, c'était dans la première jeunesse que les membres s'assouplissaient; Carlotta était à peine plus âgée que nous quand elle avait débuté à la Scala de Milan; ce nom illustre nous ouvrirait toutes les portes… Comment résister à tant de bonnes raisons?.. Mon père finit par céder, ou plutôt par en avoir l'air.

Un matin, il nous fit venir, ma sœur et moi, dans sa chambre. Il était à demi-agenouillé dans un fauteuil, du haut duquel il nous considéra quelques instants à travers son monocle.

– Ouragan, dite Chabraque, et vous Monstre-Vert, dit-il, écoutez-moi attentivement et tâchez de me comprendre: Vous allez entrer au Conservatoire de danse. Ne craignez rien, cette institution n'a que des analogies lointaines avec le couvent. Marianne vous y conduira, plusieurs fois par semaine, et vous ramènera. Là, on vous enseignera la chorégraphie, selon les bons principes. C'est votre mère qui le veut, dans l'espoir que vous éclipserez un jour la gloire de votre tante Carlotta. Puisque vous êtes là, à ne rien faire, et que vous avez besoin d'exercice, cela vous occupera, en vous dégourdissant les jambes. C'est une gymnastique excellente qui vous donnera de la grâce et vous apprendra à marcher; c'est, pour cette raison que j'ai cédé. Mais – je vous parle comme à des personnes raisonnables – mettez-vous bien ceci dans la tête, et gardez-le pour vous: je suis parfaitement décidé à ne pas faire de vous des danseuses… Sur ce, embrassez votre papa et allez essayer vos chaussons de danse.

 

Des chaussons de danse! Des corsages décolletés et sans manches! Des envolements de petites jupes en mousseline!.. Comme c'était amusant! Nous sautions de joie et nous improvisions des entrechats fantaisistes, en essayant tout cela.

LXI

La classe de danse était située rue Richer, pas loin de chez nous. La salle, très vaste, avec son plancher un peu en pente, était au rez-de-chaussée, sur une cour intérieure. A trois des parois était fixée une barre de bois, pareille à une rampe d'escalier, à laquelle on se tenait pour les exercices. Le quatrième côté était occupé par les parents, assis sur des banquettes ou sur des chaises et formant public. Sous une glace, au milieu de ce mur, dans un espace libre, était le siège du professeur. Il s'appelait M. Siau et, comme le concierge s'appelait M. Baquet, ce facétieux hasard était la source de faciles et constantes plaisanteries.

M. Baquet était chargé du balayage et arrosait le parquet en faisant des huit, à l'aide d'un entonnoir.

Une centaine d'élèves, garçons et filles, bourdonnaient dans cette classe, emplie d'un joyeux tumulte, tant que le maître n'était pas arrivé. Dès qu'il paraissait, chétif et maigre, dans sa redingote noire, son violon à la main, le silence s'établissait, chacun courait à sa place, saisissant d'une main la barre de bois. On s'apercevait alors qu'il y avait plus de filles que de garçons.

M. Siau posait son violon sur sa chaise, accrochait son chapeau, frappait dans ses mains et les exercices commençaient.

– Un, deux … un, deux!..

Toute une forêt de jambes inégales, se levaient et s'abaissaient, pas du tout en mesure, dans un complet désarroi. Le maître se fâchait, comptait plus fort, se précipitait sur un pied, dont la pointe se tournait en dedans, et, d'un mouvement brusque, la remettait en dehors.

Comme c'était drôle et comme il rageait, le pauvre professeur! Il tapait du pied, crispait les poings, en mâchonnant des imprécations, s'ébouriffait les cheveux, levait les bras vers le plafond, jusqu'à ce qu'il eût obtenu, enfin, de voir toutes les jambes se lever à la fois et retomber ensemble. Alors on changeait de main, et, tournant le dos aux fenêtres, on recommençait les mêmes battements avec l'autre jambe.

On se reposait un moment, puis la seconde partie du travail commençait. Rangés en lignes, en travers de la salle, les plus petits par devant, on attendait le signal.

M. Siau s'était assis et avait saisi son violon. Il méditait profondément, composait le pas, qu'il allait nous donner à étudier. L'instant était solennel…

Tout à coup l'archet grinçait, le violon égrenait une mélodie sautillante, tandis que les pieds du maître s'agitaient frénétiquement: il dansait assis! Quand le pas était bien fixé, il l'énonçait. Les deux plus fortes de la classe, hors du rang, comme des chefs d'armée, se penchaient attentives et recueillaient les paroles:

– Quatre assemblés, deux ronds de jambes, trois jetés battus, une pirouette…

Elles répétaient le pas et, quand elles l'avaient bien compris, le branle commençait, la mélodie sonnait plus haut, accentuant les temps forts, et le maître, toujours assis, gigotait de plus belle.

Sauf quelques-unes, dans les premiers rangs, qui s'efforçaient de suivre, on se trémoussait au hasard et, dans les dernières lignes, on ne faisait que des farces.

Oh! oui, c'était amusant, la classe de danse! et nous ne nous faisions pas prier pour y courir. Marianne, orgueilleuse de notre tenue, passait son temps à repasser les petites jupes de mousseline et à faire des points de feston tout autour des chaussons, pour les renforcer. Elle se tenait très sérieuse sur sa chaise, avec les mamans, et oubliait sa broderie, dans la contemplation de toutes ces gambades.

Quand, après un dernier trille et une révérence générale au professeur, on se débandait, elle venait vite nous rejoindre dans la loge pour nous aider à nous rhabiller et nous empêcher de trop nous lier avec les camarades. Il y en avait, parmi les plus grandes, qui faisaient déjà partie du corps de ballet, à l'Opéra, ce qui les rendait particulièrement maniérées et vaniteuses. Mais, devant les nièces de l'illustre Carlotta, elles perdaient leur morgue et sollicitaient notre protection.

A la maison, on avait fait installer une barre dans l'antichambre, pour que nous puissions étudier, et nous y étions toujours pendues, à, faire toutes sortes de singeries.

Décidément, la danse nous passionnait, nous chassions de race, et ma mère parlait déjà de nous faire donner des leçons particulières.

LXII

Le sculpteur Etex était un jour venu voir mon père et s'était soudain enthousiasmé pour la forme de mon nez. Il avait demandé à faire mon buste et pris date, immédiatement, pour la première séance.

Quand le temps fut venu, ma mère décida qu'il fallait m'arranger une coiffure digne de passer à la postérité. On m'ondula les cheveux, en les passant au fer, puis on les disposa en bandeaux qui me cachaient les oreilles, me faisaient la tête très grosse et me changeaient complètement. J'étais très fière de cette transformation, qui me donnait l'air d'une dame, et je me pavanais devant l'armoire à glace, pour m'admirer, en attendant le départ. Le ruban pourpre et or qui retenait le chignon, me paraissait particulièrement admirable et je n'osais pas bouger de peur de déranger quelque chose à ce bel appareil.

Ma mère et ma sœur m'accompagnaient, nous prenions un fiacre, qui n'en finissait pas d'arriver à cette rue de l'Ouest, située si loin, derrière le Luxembourg.

Je ne savais pas trop ce qui m'attendait là et je ne me doutais guère de l'ennui qu'allaient me causer ces longues heures d'immobilité, sur cette haute estrade poussiéreuse, dans l'odeur du plâtre mouillé et de la terre glaise. Le vieux sculpteur démagogue agrémentait les séances de bavardages subversifs; il rugissait contre les tyrans, ce qui ne l'avait pas empêché de sculpter, dans la pierre, un triomphe de Napoléon, pour une des faces de l'Arc-de-l'Etoile, qui regardent vers la banlieue. D'autre fois, il m'accablait d'éloges et me prédisait que, quand je serais grande, je ressemblerais à Vénus!.. Mais ces louanges m'agaçaient encore plus que la politique et j'enviais beaucoup ma sœur qui pouvait courir et jouer dans le jardin, tandis que je subissais le supplice de la pose.

Il résulta, de cette longue pénitence, un joli buste en marbre de Carrare, dans lequel le nez, tout d'une pièce avec le front, et la coiffure en vieille dame, produisent un majestueux et agréable effet.

LXIII

Une très belle demoiselle, juive, dont mon père avait vanté le portrait, exposé au dernier Salon, vint le voir, pour le remercier, et lui montrer, peut-être, que l'original valait mieux encore que la peinture. Elle était accompagnée par sa mère, qui ressemblait à une gitane et avait un terrible accent marseillais. Mon père reçut aimablement la fille et la mère et promit de dire quelques mots, dans son feuilleton, d'un concert où Virginie Huet devait exécuter des variations brillantes sur: Au clair de la Lune, car la visiteuse ne se contentait pas d'être belle, elle était pianiste.

Mon père tint sa promesse, et Virginie revint dire sa reconnaissance. Cette fois, elle sollicita la faveur de nous donner, à ma sœur et à moi, des leçons de piano.

Je croyais en avoir fini avec la musique, et voilà que m'apparaissait le spectre de la sœur Fulgence, armée de joyeuses verges.

La maîtresse était moins farouche, cette fois; mais la nouvelle méthode, assez vague, l'enseignement plein de distraction et de mollesse, donnèrent des résultats analogues à ceux du premier système.

Cependant, pour nous faire comprendre la grande musique, ou peut-être simplement, parce que nous étions, là, en famille, on nous conduisait souvent au Théâtre-Italien, où chantaient tous les merveilleux artistes d'alors: Gulia Grisi, Prezzolini, Borghi-Mamo, Mario, etc.

Le drame nous occupait plus que la musique, et la mort tragique de nos cousins, nous impressionnait si vivement, qu'il fallait nous conduire dans leurs loges, derrière la scène, pour que nous puissions nous convaincre, en les embrassant, qu'ils n'étaient pas morts pour de bon.

A la maison, quand nous étions seules, à nous deux, nous rejouions la pièce: Lucrezia Borgia, de préférence: affublées de châles et d'écharpes, dérobés à la garde-robe maternelle, La terrasse était ordinairement notre scène; mais, pour bien tomber mort, sans se faire du mal, le grand lit était plus commode: et la pauvre Marianne, effarée de trouver la chambre au pillage, se hâtait, en gémissant, de remettre tout en ordre, pour nous empêcher d'être grondées.

LXIV

– Pourquoi ne joues-tu pas avec la poupée que je t'ai donnée? me demande ma mère.

– Parce qu'elle est morte.

– Tu l'as cassée?

– Non, elle n'est pas cassée…

– Et ta boîte à ouvrage, qu'est-ce qu'elle est devenue? J'ai trouvé par terre tout ce qui devait être dedans.

– Ma boîte à ouvrage est devenue un sarcophage.

Ma mère est près de se fâcher; mais mon père, très intéressé, intervient.

– La morte est dans son sarcophage, dit-il; maintenant, il reste à savoir où se trouve l'hypogée.

Je baisse le nez et garde un air très mystérieux; je ne dirai pas mon secret.

Marianne donne à entendre que la cachette doit être dans l'une des caisses à fleurs de la terrasse, qu'elle a trouvée assez bouleversée. Mon père va lui-même procéder à l'exhumation, et a bientôt découvert la boîte, qu'il rapporte dans la chambre. Elle est fermée par des bandes de papier collées, couvert de gribouillages, qui imitent un peu les hiéroglyphes.

– Si tous les rites de l'ensevelissement sont observés, dit-il, je te prends sous ma protection; tu ne seras pas grondée.

Il ouvre la boîte et met son monocle.

Ma poupée apparaît, alors, soigneusement enveloppée de bandelettes, la figure étroitement moulée par un masque, en papier d'or, pris à un bâton de sucre de pomme, entourée de toutes sortes de petits objets, dont mon père reconnaît très bien l'intention; aucun détail n'est omis, j'ai même volé quelques épis à un chapeau, pour les placer à côté de la morte.

On m'a permis de lire Le Roman de la Momie, pour me récompenser d'y avoir «collaboré», et j'ai lu plus attentivement qu'on ne le croyait. Mon père est très flatté et très content. Il me demande de lui donner cette petite momie, maintenant que, comme pour la grande, on a découvert son tombeau, et il va l'installer sur la cheminée de sa chambre.

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