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La San-Felice, Tome 09

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Et elle se renversa en arrière, sanglotant et se tordant les bras.

–Attends, attends, dit le chevalier, et prie pour sa délivrance: le jour de sa délivrance sera celui de ta liberté.

–Je vous écoute, dit Luisa ramenant sa tête en avant et la laissant tomber sur la poitrine de son mari.

–Tu sais, continua San-Felice, que, quand la, princesse royale de Naples accouche d'un garçon, elle a droit à trois grâces, qui ne lui sont jamais refusées?

–Oui, je sais cela.

–Eh bien, le jour où la princesse royale accouchera, au lieu de trois grâces, elle n'en demandera qu'une, et cette grâce sera la tienne.

–Mais dit Luisa, si elle accouche d'une fille?

–D'une fille! d'une fille! s'écria San-Felice, à la pensée duquel cette alternative ne s'était pas présentée. C'est impossible! Dieu ne le permettra pas!

–Dieu a bien permis que je fusse injustement condamnée, dit Luisa avec un douloureux sourire.

–C'est une épreuve! s'écria le chevalier, et nous sommes sur une terre d'épreuves.

–Ainsi, c'est votre seul espoir? demanda Luisa.

–Hélas! oui, répondit San-Felice; mais n'importe! Tiens (il tira un papier de sa poche), voici une supplique rédigée par le duc de Calabre, écrite par sa femme, signe-la, et fions-nous en Dieu.

–Mais je n'ai ni plume ni encre.

–J'en ai, moi, répondit le chevalier.

Et, tirant un encrier de sa poche, il y trempa une plume; puis, soutenant Luisa, il la conduisit près de la fenêtre, pour que, éclairée par le rayon de la lune, elle pût signer.

Luisa signa.

–Là! dit-il en relevant la tête, je vais te laisser cette plume, cette encre et un cahier de papier; tu trouveras bien moyen de les cacher quelque part: ils peuvent t'être utiles.

–Oh! oui, oui, donnez, mon ami! dit Luisa. Oh! comme vous êtes bon et comme vous pensez à tout! Mais qu'avez-vous, et que regardez-vous?

En effet, les regards du chevalier s'étaient, à travers les doubles barreaux de la fenêtre, fixés sur la partie du port que l'on pouvait apercevoir par l'ouverture.

A trente ou quarante mètres du pied de la tour, se balançait la goëlette du capitaine Skinner.

–Miracle du ciel! murmura le chevalier. Allons! je commence à croire que c'est lui qui est destiné à te sauver.

Un homme se promenait de long en large sur le pont, et, de temps en temps, jetait un regard avide sur le fort, comme s'il eût voulu en sonder les murailles.

En ce moment, la clef grinça dans la serrure: onze heures sonnaient.

Le chevalier prit la tête de Luisa entre ses deux mains et dirigea son regard vers le pont du petit bâtiment.

–Vois-tu cet homme? lui dit-il à voix basse.

–Oui, je le vois. Eh bien, après?

–Eh bien, Luisa, cet homme, c'est lui.

–Qui, lui? demanda la jeune femme toute frissonnante.

–Celui qui te sauvera si je ne te sauve pas, moi. Mais (il lui prit la tête et lui baisa passionnément le front et les yeux) je te sauverai! je te sauverai! je te sauverai!

Et il s'élança hors de la prison, dont la porte se referma sans que Luisa s'en aperçût.

Toute son âme était passée dans ses yeux, et ses yeux dévoraient de leur regard cet homme qui se promenait sur le pont de la goëlette.

XCIX
PETITS ÉVÉNEMENTS GROUPÉS AUTOUR DES
GRANDS

Si la scène se fût passée de jour, au lieu de se passer dans la nuit, le chevalier se fût précipité par les escaliers, sans s'inquiéter du geôlier en chef, et en continuant de s'écrier: «Je la sauverai!» Mais le corridor était dans l'obscurité la plus complète, n'ayant pas même le rayon de lune qui éclairait la prison de Luisa.

Force lui fut d'attendre le guichetier et sa lanterne.

Celui-ci le reconduisit avec les mêmes marques d'attention dont il l'avait comblé à son arrivée. Aussi, arrivé dans la cour, le chevalier mit-il la main à sa poche et, en tirant les quelques pièces d'or qu'elle contenait, les offrit-il au geôlier.

Celui-ci les prit et les pesa d'un air mélancolique dans sa main en secouant la tête.

–Mon ami, dit San-Felice, c'est bien peu, je le sais; mais je me souviendrai de toi, sois tranquille; seulement, c'est à la condition que tu auras toute sorte d'égards pour la pauvre femme qui est ta prisonnière.

–Je ne me plains pas de ce que Votre Excellence me donne, tant s'en faut! répondit-il. Mais, si Son Excellence voulait, elle pourrait, d'un mot, faire plus pour moi que je ne pourrai jamais faire pour elle.

–Et que puis-je faire pour toi? demanda San-Felice.

–J'ai un fils, Excellence, et, depuis un an, je sollicite sans pouvoir l'obtenir, son admission comme geôlier dans la forteresse. S'il y était, je le chargerais spécialement du service de la dame en question, dont je ne peux pas m'occuper, n'ayant que la surveillance générale.

–Je ne demande pas mieux, dit San-Felice, qui pensa tout de suite au parti qu'il pouvait tirer de ce protecteur de bas étage. Et de qui dépend sa nomination?

–Sa nomination dépend du chef de la police.

–T'es-tu déjà adressé à lui?

–Oui; mais, vous comprenez, Excellence, il faudrait pouvoir… (et il fit le geste d'un homme qui compte de l'argent), et je ne suis pas riche.

–C'est bien: tu feras une demande et tu me l'adresseras.

–Excellence, dit le geôlier en chef en tirant un papier de sa poche, pendant que vous étiez dans la chambre de la prisonnière, j'ai rédigé ma demande, pensant que vous seriez assez bon pour vous en charger.

–Je m'en charge, en effet, mon ami, dit le chevalier, et il ne dépendra pas de moi que tu n'obtiennes ce que tu désires. Si tu as besoin de moi, viens chez Son Altesse royale le duc de Calabre et demande le chevalier San-Felice.

Et, mettant la pétition dans sa poche, le chevalier prit congé de son protégé, sortit de la forteresse et se dirigea vers la place des Quatre-Cantons, où, on se le rappelle, il avait rendez-vous avec le faux capitaine américain.

Celui-ci l'attendait, et, en l'apercevant, marcha droit à lui.

Tous deux s'abordèrent en s'interrogeant.

Joseph Palmieri raconta sa visite au roi, se félicita de la façon dont il avait été reçu et surtout de la certitude où il était maintenant de pouvoir rester à son mouillage, c'est-à-dire dans le voisinage du fort.

De son côté, le chevalier lui fit part de son projet, et, pour qu'il s'en rendît bien compte, lui donna à lire la demande en grâce rédigée par le duc de Calabre.

Joseph Palmieri s'approcha de la lampe d'une madone et lut; dans sa distraction, le chevalier s'était trompé et lui avait donné à lire la supplique du geôlier en chef, au lieu de la demande en grâce du duc.

Mais Joseph Palmieri n'était pas homme à laisser passer à portée de sa main une circonstance qui pût lui être utile sans mettre la main dessus. Il commença par prendre l'adresse du futur geôlier: Tonino Monti, via della Salute, nº 7; et, rendant la supplique au chevalier:

–Vous vous êtes trompé de papier, lui dit-il.

Le chevalier fouilla à sa poche et y trouva, en effet, le placet qu'il avait cru donner et en place duquel il avait donné la supplique du geôlier en chef.

Joseph Palmieri la lut avec plus d'attention encore que la première.

–Oui, sans doute, dit-il, si Ferdinand a un coeur, il y a une chance; mais je doute qu'il en ait un.

Et il remit la demande en grâce au chevalier.

–A quelle époque, demanda-t-il, comptez-vous sur l'accouchement de la princesse?

–Mais elle attend sa délivrance du jour au lendemain.

–Attendons comme elle, dit Palmieri. Mais, si le roi refuse, ou si elle accouche d'une fille?..

–Alors, vous recevrez cette même supplique déchirée en morceaux, ce qui voudra dire que vous pouvez agir à votre tour, attendu que, de notre coté, il n'y aura plus d'espoir; ou sinon ce seul mot: SAUVÉE! vous dira tout ce que vous aurez besoin de savoir. Seulement, vous me donnez votre parole de ne rien tenter d'ici là?

–Je vous la donne; seulement, vous me permettrez de m'informer topographiquement de la chambre qu'occupe la prisonnière dans la forteresse?

Le chevalier saisit la main de son interlocuteur, en la lui serrant avec un mouvement de fiévreuse énergie.

–La jeunesse est puissante devant le Seigneur, dit-il. La fenêtre de la prisonnière donne directement sur la goëlette le Runner.

Et il s'éloigna rapidement en cachant son visage dans son manteau.

Le chevalier ne s'était pas trompé, et, cette fois encore, les sympathiques effluves de la jeunesse avaient divisé leurs courants magnétiques. A peine le chevalier avait-il quitté la chambre de Luisa, après lui avoir fait remarquer cet homme, qui, à une demi-encablure du pied de la forteresse, se promenait pensif sur le pont de la goëlette, que Salvato-car c'était bien Salvato lui-même-crut entendre passer dans l'air son nom emporté par la brise de la nuit.

Il leva la tête, ne vit rien et crut s'être trompé.

Mais le même son frappa une seconde fois son oreille.

Ses yeux se fixèrent alors sur l'ouverture sombre qui se dessinait dans la muraille grise, et, à travers les barreaux de cette ouverture, il crut voir s'agiter une main et un mouchoir.

Le cri correspondant à celui qui sortait du coeur de la prisonnière s'élança du sien, et les ondes de l'air frémirent de nouveau, agitées par ces deux syllabes: «Luisa!»

Le mouchoir se détacha de la main, flotta un instant dans l'air et tomba au pied de la muraille.

Salvato eut la prudence d'attendre un instant, de regarder autour de lui si personne n'avait vu ce qui venait de se passer, et, s'étant assuré que tout était bien resté entre lui et la prisonnière, sans prévenir aucun des hommes de l'équipage, il mit le youyou à, la mer, et, comme un pêcheur qui tend ses ligues, il s'approcha de la plage.

Un espace de terrain d'une dizaine de mètres séparait le quai du pied du mur de la prison, et le bonheur voulut qu'aucune sentinelle n'y fût placée.

 

Salvato amarra son canot au rivage, ne fit qu'un bond, se trouva au pied de la muraille, ramassa le mouchoir et revint au canot.

A peine y avait-il repris sa place, qu'il entendit le pas mesuré d'une patrouille; mais, au lieu de s'éloigner du quai, ce qui eût pu donner des soupçons, il enfonça le mouchoir dans sa poitrine et resta dans le canot, faisant avec sa ligne ce mouvement de haut en bas que fait un homme qui pêche à la palangre.

La patrouille parut au pied de la tour; le sergent qui la commandait se détacha des rangs et s'approcha du canot.

–Que fais-tu là? demanda-t-il à Salvato, vêtu en simple marin.

Celui-ci lui fit répéter la question une seconde fois, comme s'il n'eût pas compris; puis:

–Vous le voyez bien, répondit Salvato avec un accent anglais très-prononcé, je pêche.

Quoique détestés par les Siciliens, les Anglais devaient à la présence de Nelson certains égards que l'on n'accordait point aux individus des autres nations.

–Il est défendu d'amarrer des bateaux au quai, répondit le chef de la patrouille, et il y a de la place dans le port pour pêcher sans venir pêcher ici. Au large donc, l'ami!

Salvato fit entendre un grognement de mauvaise humeur, tira du fond de la mer sa palangre, à laquelle il eut la chance de trouver pendu un calamaris, et rama vers la goëlette.

–Bon! dit le sergent en rejoignant sa patrouille, voilà qui le changera de son boeuf salé.

Et, enchanté de la plaisanterie, il disparut un instant sous une voûte dont il explora la profondeur sombre, reparut et continua sa ronde de nuit en longeant les murs extérieurs de la forteresse.

Quant à Salvato, il s'était déjà plongé dans l'intérieur de la goëlette, baisant le mouchoir marqué d'une L, d'une S et d'une F.

Un des quatre coins était noué; il y porta vivement la main et sentit un papier.

Sur le papier étaient écrits ces mots:

«Je t'ai reconnu, je te vois, je t'aime! Voici mon premier moment de joie depuis que je t'ai quitté.

»Mon Dieu, pardonnez-moi si c'est parce que j'espère en lui que j'espère en vous!

»Ta LUISA.»

Salvato remonta sur le pont; ses yeux se reportèrent immédiatement vers l'ouverture.

La main blanche se dessinait toujours sur les barreaux sombres.

Salvato secoua le mouchoir, le baisa, et son nom passa de nouveau à son oreille avec la brise de la nuit.

Mais, comme il eût été imprudent, par une nuit aussi claire, de continuer un semblable échange de signes, Salvato s'assit et demeura immobile, tandis qu'à travers le double barreau, son oeil, habitué aux ténèbres, pouvait encore distinguer la blanche apparition, vers laquelle ne le guidait plus la main imprudente.

Quelques instants après, on entendit le bruit d'une double rame qui battait la mer, et l'on vit, à travers le labyrinthe de bâtiments qui couvraient le port, s'avancer une barque qui s'arrêta au pied du petit escalier de la goëlette.

C'était Joseph Palmieri qui rentrait à bord.

–Bonne nouvelle! s'écria en anglais Salvato, s'élançant dans les bras de son père. Elle est là, là, à cette fenêtre! Voilà son mouchoir et une lettre d'elle!

Joseph Palmieri sourit d'un ineffable sourire et murmura:

–O pauvre chevalier! tu avais bien raison de dire: «La jeunesse est puissante devant Dieu!»

C
LA NAISSANCE D'UN PRINCE ROYAL

Quelques jours après les événements que nous venons de raconter, le roi chassait la caille à tir, escorté de son fidèle Jupiter, dans les jardins de la Bagaria et sur le versant septentrional des collines qui s'élèvent à quelque distance de la plage.

Il avait avec lui les deux plus fidèles compagnons de ces sortes de plaisirs, excellents tireurs comme lui, sir William Hamilton et le président Cardillo.

La chasse était splendide: c'était le retour des cailles.

Les cailles, comme tout chasseur sait, ont par an deux passages. Dans le premier, aux mois d'avril et de mai, elles vont du midi au nord; à cette époque, elles sont maigres et sans saveur. Dans le second, qui a lieu au mois de septembre et d'octobre, elles sont, au contraire, grasses et succulentes, surtout en Sicile, leur première étape pour regagner l'Afrique.

Le roi Ferdinand s'amusait donc, – nous ne dirons pas comme un roi, nous savons trop bien que, tout roi qu'il était, il ne s'était pas toujours amusé, mais comme un chasseur qui nage dans le gibier.

Il avait tiré cinquante coups et tué cinquante pièces, et il offrait de parier qu'il irait ainsi jusqu'à la centaine, sans en manquer une seule.

Tout à coup, on vit venir un cavalier courant à toute bride; et, guidé par les coups de fusil, à la distance de cinq cents pas à peu près des chasseurs, il arrêta son cheval, se dressa sur ses étriers pour voir lequel des trois était le roi, et, l'ayant reconnu, il vint droit à lui.

Ce cavalier était un messager que le duc de Calabre envoyait au roi, son père, pour lui annoncer que la duchesse était prise des premières douleurs, et, le prier, selon les lois de l'étiquette, d'assister à l'accouchement.

–Bon! fit le roi, tu dis les premières douleurs?

–Oui, sire.

–En ce cas, j'ai bien une heure ou deux devant moi. Antonio Villari est-il là?

–Oui, sire, et deux autres médecins avec lui.

–Alors, tu vois bien: je n'y puis rien faire. Tout beau, Jupiter! Je vais encore tuer quelques cailles. Retourne à Palerme, et dis au prince que je te suis.

Et il alla à Jupiter, qui, sur la recommandation de son maître, tenait l'arrêt aussi ferme que s'il eût été changé en pierre.

La caille partit, le roi la tua.

–Cinquante et une, Cardillo! dit-il.

–Pardieu! dit le président, de mauvaise humeur de n'en être qu'à la trentaine, avec un chien comme le vôtre, ce n'est pas malin. Je ne sais même pas comment Votre Majesté se donne la peine de brûler de la poudre et de semer du plomb. A sa place, je prendrais le gibier à la main.

Le domestique qui suivait le roi, lui passait, pendant ce temps, un autre fusil tout chargé.

–Eh bien, dit le roi au messager, tu n'es pas encore parti?

–J'attendais pour savoir si le roi n'avait pas d'autres ordres à me donner.

–Tu diras à mon fils que j'en suis à ma cinquante et unième caille, et que Cardillo n'est encore qu'à sa trentième.

Le messager repartit au galop, et la chasse continua.

Le roi, en une heure, tua vingt-cinq autres cailles.

Il changeait son fusil déchargé contre un fusil chargé, lorsqu'il vit revenir le même messager à fond de train.

–Eh bien, lui cria-t-il, tu viens me dire que la duchesse est accouchée?

–Non, sire; je viens, au contraire, dire à Votre Majesté qu'elle souffre beaucoup.

–Que veut-elle que j'y fasse?

–Votre Majesté sait qu'en pareille circonstance sa présence est commandée par le cérémonial. Il peut arriver un malheur.

–Eh bien, demanda le président, qu'y a-t-il?

–Il y a que cela ne va pas tout seul, à ce qu'il paraît, répondit Ferdinand.

–De sorte que nous allons quitter la chasse au milieu de la journée? Au reste, que Votre Majesté la quitte si elle veut, je reste: je ne m'en retournerai que quand j'aurai mes cent pièces.

–Ah! dit Ferdinand, une idée! Retourne vite à Palerme et ordonne de sonner toutes les cloches.

–Et je puis dire à Son Altesse royale…?

–Tu peux lui dire que j'y suis aussitôt que toi. As-tu vu nos chevaux?

–Ils sont à la grille de la Bagaria, sire.

–Eh bien, dis-leur, en passant, de se rapprocher.

Le messager repartit au galop.

Un quart d'heure après, toutes les cloches de Palerme étaient en branle.

–Ah! dit le roi, voilà qui doit lui faire du bien. Et il continua sa chasse.

Il en était à sa quatre-vingt-dixième caille, sans en avoir manqué une seule.

–Voulez-vous parier que j'irai jusqu'à la centaine, sans un faux coup, Cardillo?

–Ce n'est pas la peine.

–Pourquoi cela?

–Parce que voilà le messager qui revient.

–Diable! dit Ferdinand. Tout beau, Jupiter! Je vais toujours tuer ma quatre-vingt-onzième, en attendant.

La caille partit, le roi la tua.

Lorsqu'il se retourna, le messager était près de lui.

–Eh bien, lui demanda Ferdinand, les cloches l'ont-elles soulagée?

–Non, sire: les médecins ont des craintes.

–Les médecins ont des craintes! répéta Ferdinand en se grattant l'oreille. C'est grave, alors?

–Très-grave, sire.

–En ce cas, qu'on expose le saint sacrement.

–Sire, je ferai observer à Votre Majesté que les médecins disent que votre présence est urgente.

–Urgente! urgente! répéta Ferdinand avec impatience; je n'y ferai pas plus que le bon Dieu!

–Sire, le cheval de Votre Majesté est là.

–Je le vois bien, pardieu! Va, va, mon garçon; et, si le saint sacrement n'y fait rien, j'irai moi-même.

Et il ajouta à voix basse:

–Quand j'aurai tué mes cent cailles, bien entendu.

Au bout d'un quart d'heure, le roi avait tué ces cent cailles. Sir William l'avait suivi de près et en avait tué quatre-vingt-sept. Le président Cardillo était de dix en arrière sur sir William et de vingt-trois sur le roi: aussi était-il furieux.

Les cloches sonnaient toujours à grande volée, ce qui prouvait qu'il n'y avait pas de nouveau.

Alla malora! dit le roi avec un soupir, il paraît qu'elle s'entête à ne rien finir que je ne sois là. Allons-y donc. On a bien raison de dire: «Ce que femme veut, Dieu le veut.»

Et, sautant à cheval:

–Vous êtes libres d'aller jusqu'à vos cent cailles, dit-il aux deux autres chasseurs. Moi, je retourne à Palerme.

–En ce cas, dit sir William, je suis Votre Majesté: ma charge m'oblige à ne pas vous quitter dans un pareil moment.

–C'est bien, allez, dit Cardillo; moi, je reste.

Le roi et sir William mirent leurs montures au galop.

Au moment où ils entraient dans la ville, le carillon des cloches cessa.

–Ah! ah! dit le roi, il paraît que c'est fini. Maintenant, reste à savoir si c'est un garçon ou une fille.

On passa devant une église: tous les cierges étaient allumés, le saint sacrement était exposé sur l'autel, l'église était pleine de gens qui priaient.

On entendit le bruit des pétards et l'on vit l'air sillonné par les fusées.

–Bien! dit le roi, voilà qui est de bon augure.

Le roi vit de loin venir le même messager; il tenait son chapeau en l'air et criait: «Vive le roi!» Tout le monde courait après lui ou s'élançait au-devant de lui. C'était miracle qu'il n'écrasât personne.

Du plus loin qu'il aperçut le roi:

–Un prince, sire! un prince! cria-t-il.

–Eh bien, dit le roi à sir William, quand j'aurais été là, je n'y aurais rien ajouté.

Les cris du peuple annoncèrent l'arrivée de Ferdinand au palais.

Tout le monde était dans la joie, et le roi était attendu avec la plus grande impatience.

Le duc et la duchesse de Calabre avaient pris à coeur la cause de la San-Felice, non pour elle, qu'ils ne connaissaient pas, l'ayant vue à peine, mais pour son mari.

Le pauvre chevalier, plus mort que vif, plus agité surtout que si c'était son propre sort qui allait se débattre, était à genoux dans un cabinet attenant à la chambre à coucher, et priait.

C'est qu'il connaissait le roi, et qu'il savait qu'il avait beaucoup à craindre et peu à espérer.

La jeune mère était dans son lit. Elle n'avait aucun doute, elle: qui pourrait refuser quelque chose à ce bel enfant qu'elle venait de mettre au monde avec tant de douleurs? Ce serait une impiété!

Ne serait-il pas roi un jour? n'était-il pas d'heureux augure qu'il entrât dans la vie par la porte de la clémence et en balbutiant le mot Grâce!

On avait eu le temps, son grand-père n'étant pas encore là au moment de sa naissance, de lui faire sa toilette et de lui passer une magnifique robe de dentelles.

Il avait les cheveux blonds des princes autrichiens, des yeux bleus étonnés qui regardaient sans voir, la peau fraîche comme une rose et blanche comme du satin.

La mère le tenait couché près d'elle, ne se lassant pas de l'embrasser. Elle lui avait glissé, dans les plis de la robe qui recouvrait ses langes royaux, la supplique de la malheureuse San-Felice.

On entendit dans la rue, se rapprochant du palais sénatorial, les cris de «Vive le roi!»

Le prince pâlit: il lui sembla, à lui si craintif devant son père, qu'il allait commettre un crime de lèse-majesté.

La princesse fut plus courageuse que lui.

–O François, dit-elle, nous ne pouvons cependant pas abandonner cette pauvre femme!

 

San-Felice, qui entendit ces mots, ouvrit la porte de l'alcôve, et par cette porte passa sa tête pâle et effarée.

–O mon prince! dit-il avec le ton du reproche.

–J'ai promis, je tiendrai, dit François. J'entends les pas du roi: ne te montre pas, ou tu perds tout.

San-Felice referma la porte du cabinet au moment où le roi ouvrait celle de la chambre à coucher.

–Eh bien, eh bien, dit-il en entrant, tout est donc fini, et de la bonne façon, grâce à Dieu! Je te fais mon compliment, François.

–Et à moi, sire? demanda l'accouchée.

–A vous, je vous le ferai quand j'aurai vu l'enfant.

–Sire, vous savez que j'ai droit à trois faveurs, dit la princesse, comme ayant donné un héritier au royaume?

–Et on vous les accordera, si c'est un beau mâle.

–Oh! sire, c'est un ange!

Et elle prit l'enfant à son côté et le présenta au roi.

–Ah! par ma foi, dit le roi en le lui prenant des mains et en se retournant vers son fils, je n'aurais pas mieux fait, moi qui m'en pique.

Il y eut un moment de silence; toutes les respirations étaient arrêtées, tous les coeurs cessaient de battre.

On attendait que le roi vît le placet.

–Oh! oh! qu'a-t-il donc sous le bras?

–Sire, dit Marie-Clémentine, au lieu des trois faveurs que l'on accorde d'habitude à la princesse royale qui donne un héritier à la couronne, je n'en demande qu'une.

Et sa voix, en prononçant ces paroles, était si tremblante, que le roi la regardait avec étonnement.

–Diable! ma chère fille, dit le roi, il paraît que c'est bien difficile, ce que vous désirez?

Et, couchant l'enfant dans le pli de son bras gauche, il prit le papier de la main droite et le déplia lentement en regardant le prince François, qui pâlit, et la princesse Marie-Clémentine, qui se laissa retomber sur son oreiller.

Le roi commença de lire; mais, dès les premiers mots, son sourcil se fronça et l'expression de son visage devint sinistre.

–Oh! dit-il avant même d'avoir tourné la page, si c'était cela que vous aviez à me demander, monsieur mon fils, et vous, madame ma belle-fille, vous avez perdu votre peine. Cette femme est condamnée, cette femme mourra.

–Sire! balbutia le prince.

–Dieu lui-même voudrait la sauver, que j'entrerais en lutte contre Dieu!

–Sire, au nom de cet enfant!

–Tenez! s'écria le roi, reprenez-le, votre enfant! le voilà, je vous le rends.

Et, le rejetant violemment sur le lit, il sortit en criant:

–Jamais! jamais!

La princesse Marie-Clémentine poussa un gémissement et prit dans ses bras son enfant qui pleurait.

–Oh! pauvre innocent! dit-elle, cela te portera malheur…

Le prince tomba sur une chaise sans avoir la force de prononcer une parole.

Le chevalier poussa la porte du cabinet, et, plus pâle qu'un mort, il vint ramasser la supplique qui était tombée à terre.

–O mon ami! dit le prince en lui tendant la main, tu le vois, il n'y a pas de notre faute.

Mais lui, sans paraître voir ni entendre le prince, sortit en déchirant la supplique et en disant:

–C'est véritablement un monstre que cet homme!

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