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«Sans doute celui que nous poursuivons se crut bien seul, car j'entendis le grincement de la clef; la porte s'ouvrit et il disparut.

– Le misérable! dit Aramis, pendant que vous êtes revenu, il aura fui, et nous ne le retrouverons pas.

– Allons donc, Aramis, dit d'Artagnan, vous me prenez pour un autre.

– Cependant, dit Athos, en votre absence…

– Eh bien, en mon absence, n'avais-je pas pour me remplacer Grimaud et l'Écossais? Avant qu'il eût le temps de faire dix pas dans l'intérieur j'avais fait le tour de la maison, moi. À l'une des portes, celle par laquelle il était entré, j'ai mis notre Écossais en lui faisant signe que si l'homme au masque noir sortait, il fallait le suivre où il allait, tandis que Grimaud le suivrait lui-même et reviendrait nous attendre où nous étions. Enfin, j'ai mis Grimaud à la seconde issue, en lui faisant la même recommandation, et me voilà. La bête est cernée; maintenant, qui veut voir l'hallali?

Athos se précipita dans les bras de d'Artagnan, qui s'essuyait le front.

– Ami, dit-il, en vérité vous avez été trop bon de me pardonner; j'ai tort, cent fois tort, je devrais vous connaître pourtant; mais il y a au fond de nous quelque chose de méchant qui doute sans cesse.

– Hum! dit Porthos, est-ce que le bourreau ne serait point par hasard M. Cromwell, qui pour être sûr que sa besogne fût bien faite, aurait voulu la faire lui-même!

– Ah bien oui! M. Cromwell est gros et court, et celui-là mince, élancé et plutôt grand que petit.

– Quelque soldat condamné auquel on aura offert sa grâce à ce prix, dit Athos, comme on a fait pour le malheureux Chalais.

– Non, non, continua d'Artagnan, ce n'est point la marche mesurée d'un fantassin; ce n'est point non plus le pas écarté d'un homme de cheval. Il y a dans tout cela une jambe fine, une allure distinguée. Ou je me trompe fort, ou nous avons affaire à un gentilhomme.

– Un gentilhomme! s'écria Athos, impossible! ce serait un déshonneur pour toute la seigneurie.

– Belle chasse! dit Porthos avec un rire qui fit trembler les vitres; belle chasse, mordieu!

– Partez-vous toujours, Athos? demanda d'Artagnan.

– Non, je reste, répondit le gentilhomme avec un geste de menace qui ne promettait rien de bon à celui à qui ce geste était adressé.

– Alors, les épées! dit Aramis, les épées! et ne perdons pas un instant.

Les quatre amis reprirent promptement leurs habits de gentilshommes, ceignirent leurs épées, firent monter Mousqueton, Blaisois, et leur ordonnèrent de régler la dépense avec l'hôte et de tenir tout prêt pour leur départ, les probabilités étant que l'on quitterait Londres la nuit même.

La nuit s'était assombrie encore, la neige continuait de tomber et semblait un vaste linceul étendu sur la ville régicide; il était sept heures du soir à peu près, à peine voyait-on quelques passants dans les rues, chacun s'entretenait en famille et tout bas des événements terribles de la journée.

Les quatre amis, enveloppés de leurs manteaux, traversèrent toutes les places et les rues de la Cité, si fréquentées le jour, et si désertes cette nuit-là. D'Artagnan les conduisait, essayant de reconnaître de temps en temps des croix qu'il avait faites avec son poignard sur les murailles; mais la nuit était si sombre que les vestiges indicateurs avaient grand'peine à être reconnus. Cependant d'Artagnan avait si bien incrusté dans sa tête chaque borne, chaque fontaine, chaque enseigne, qu'au bout d'une demi- heure de marche il parvint, avec ses trois compagnons, en vue de la maison isolée.

D'Artagnan crut un instant que le frère de Parry avait disparu; il se trompait: le robuste Écossais, accoutumé aux glaces de ses montagnes, s'était étendu contre une borne, et comme une statue abattue de sa base, insensible aux intempéries de la saison, s'était laissé recouvrir de neige; mais à l'approche des quatre hommes il se leva.

– Allons, dit Athos, voici encore un bon serviteur. Vrai Dieu! les braves gens sont moins rares qu'on ne le croit; cela encourage.

– Ne nous pressons pas de tresser des couronnes pour notre Écossais, dit d'Artagnan; je crois que le drôle est ici pour son propre compte. J'ai entendu dire que ces messieurs qui ont vu le jour de l'autre côté de la Tweed sont fort rancuniers. Gare à maître Groslow! il pourra bien passer un mauvais quart d'heure s'il le rencontre.

En se détachant de ses amis il s'approcha de l'Écossais et se fit reconnaître. Puis il fit signe aux autres de venir.

– Eh bien? dit Athos en anglais.

– Personne n'est sorti, répondit le frère de Parry.

– Bien, restez avec cet homme, Porthos, et vous aussi, Aramis.

D'Artagnan va me conduire à Grimaud.

Grimaud, non moins habile que l'Écossais, était collé contre un saule creux dont il s'était fait une guérite. Un instant, comme il l'avait craint pour l'autre sentinelle, d'Artagnan crut que l'homme masqué était sorti et que Grimaud l'avait suivi.

Tout à coup une tête apparut et fit entendre un léger sifflement.

– Oh! dit Athos.

– Oui, répondit Grimaud.

Ils se rapprochèrent du saule.

– Eh bien, demanda d'Artagnan, quelqu'un est-il sorti?

– Non, mais quelqu'un est entré, dit Grimaud.

– Un homme ou une femme?

– Un homme.

– Ah! ah! dit d'Artagnan; ils sont deux, alors.

– Je voudrais qu'ils fussent quatre, dit Athos, au moins la partie serait égale.

– Peut-être sont-ils quatre, dit d'Artagnan.

– Comment cela?

– D'autres hommes ne pouvaient-ils pas être dans cette maison avant eux et les y attendre?

– On peut voir, dit Grimaud en montrant une fenêtre à travers les contrevents de laquelle filtraient quelques rayons de lumière.

– C'est juste, dit d'Artagnan, appelons les autres.

Et ils tournèrent autour de la maison pour faire signe à Porthos et à Aramis de venir.

Ceux-ci accoururent empressés.

– Avez-vous vu quelque chose? dirent-ils.

– Non, mais nous allons voir, répondit d'Artagnan en montrant Grimaud, qui, en s'accrochant aux aspérités de la muraille, était déjà parvenu à cinq ou six pieds de la terre.

Tous quatre se rapprochèrent. Grimaud continuait son ascension avec l'adresse d'un chat; enfin il parvint à saisir un de ces crochets qui servent à maintenir les contrevents quand ils sont ouverts; en même temps son pied trouva une moulure qui parut lui présenter un point d'appui suffisant, car il fit un signe qui indiquait qu'il était arrivé à son but. Alors il approcha son oeil de la fente du volet.

– Eh bien? demanda d'Artagnan.

Grimaud montra sa main fermée avec deux doigts ouverts seulement.

– Parle, dit Athos, on ne voit pas tes signes. Combien sont-ils?

Grimaud fit un effort sur lui-même.

– Deux, dit-il, l'un est en face de moi; l'autre me tourne le dos.

– Bien. Et quel est celui qui est en face de toi?

– L'homme que j'ai vu passer.

– Le connais-tu?

– J'ai cru le reconnaître et je ne me trompais pas; gros et court.

– Qui est-ce? demandèrent ensemble et à voix basse les quatre amis.

– Le général Olivier Cromwell.

Les quatre amis se regardèrent.

– Et l'autre? demanda Athos.

– Maigre et élancé.

– C'est le bourreau, dirent à la fois d'Artagnan et Aramis.

– Je ne vois que son dos, reprit Grimaud; mais attendez, il fait un mouvement, il se retourne; et s'il a déposé son masque, je pourrai voir… Ah!

Grimaud, comme s'il eût été frappé au coeur, lâcha le crochet de fer et se rejeta en arrière en poussant un gémissement sourd. Porthos le retint dans ses bras.

– L'as-tu vu? dirent les quatre amis.

– Oui, dit Grimaud les cheveux hérissés et la sueur au front.

– L'homme maigre et élancé? dit d'Artagnan.

– Oui.

– Le bourreau, enfin? demanda Aramis.

– Oui.

– Et qui est-ce? dit Porthos.

– Lui! lui! balbutia Grimaud pâle comme un mort et saisissant de ses mains tremblantes la main de son maître.

– Qui, lui? demanda Athos.

– Mordaunt! … répondit Grimaud.

D'Artagnan, Porthos et Aramis poussèrent une exclamation de joie.

Athos fit un pas en arrière et passa la main sur son front:

– Fatalité! murmura-t-il.

LXXIII. La maison de Cromwell

C'était effectivement Mordaunt que d'Artagnan avait suivi sans le reconnaître.

En entrant dans la maison il avait ôté son masque, enlevé la barbe grisonnante qu'il avait mise pour se déguiser, avait monté l'escalier, avait ouvert une porte, et, dans une chambre éclairée par la lueur d'une lampe et tendue d'une tenture de couleur sombre, s'était trouvé en face d'un homme assis devant un bureau et écrivant.

Cet homme, c'était Cromwell.

Cromwell avait dans Londres, on le sait, deux ou trois de ces retraites inconnues même au commun de ses amis, et dont il ne livrait le secret qu'à ses plus intimes. Or, Mordaunt, on se le rappelle, pouvait être compté au nombre de ces derniers.

Lorsqu'il entra, Cromwell leva la tête.

– C'est vous, Mordaunt, lui dit-il, vous venez tard.

– Général, répondit Mordaunt, j'ai voulu voir la cérémonie jusqu'au bout, cela m'a retardé.

– Ah! dit Cromwell, je ne vous croyais pas d'ordinaire aussi curieux que cela.

– Je suis toujours curieux de voir la chute d'un des ennemis de Votre Honneur, et celui-là n'était pas compté au nombre des plus petits. Mais vous, général, n'étiez-vous pas à White-Hall?

– Non, dit Cromwell.

Il y eut un moment de silence.

– Avez-vous eu des détails? demanda Mordaunt.

– Aucun. Je suis ici depuis le matin. Je sais seulement qu'il y avait un complot pour sauver le roi.

– Ah! vous saviez cela? dit Mordaunt.

– Peu importe. Quatre hommes déguisés en ouvriers devaient tirer le roi de prison et le conduire à Greenwich, où une barque l'attendait.

 

– Et sachant tout cela, Votre Honneur se tenait ici, loin de la

Cité, tranquille et inactif!

– Tranquille, oui, répondit Cromwell; mais qui vous dit inactif?

– Cependant, si le complot avait réussi?

– Je l'eusse désiré.

– Je pensais que Votre Honneur regardait la mort de Charles Ier comme un malheur nécessaire au bien de l'Angleterre.

– Eh bien! dit Cromwell, c'est toujours mon avis. Mais, pourvu qu'il mourût, c'était tout ce qu'il fallait; mieux eût valu, peut- être, que ce ne fût point sur un échafaud.

– Pourquoi cela, Votre Honneur?

Cromwell sourit.

– Pardon, dit Mordaunt, mais vous savez, général, que je suis un apprenti politique, et je désire profiter en toutes circonstances des leçons que veut bien me donner mon maître.

– Parce qu'on eût dit que je l'avais fait condamner par justice, et que je l'avais laissé fuir par miséricorde.

– Mais s'il avait fui effectivement?

– Impossible.

– Impossible?

– Oui, mes précautions étaient prises.

– Et Votre Honneur connaît-il les quatre hommes qui avaient entrepris de sauver le roi?

– Ce sont ces quatre Français dont deux ont été envoyés par

Madame Henriette à son mari, et deux par Mazarin à moi.

– Et croyez-vous, monsieur, que Mazarin les ait chargés de faire ce qu'ils ont fait?

– C'est possible, mais il les désavouera.

– Vous croyez?

– J'en suis sûr.

– Pourquoi cela?

– Parce qu'ils ont échoué.

– Votre Honneur m'avait donné deux de ces Français alors qu'ils n'étaient coupables que d'avoir porté les armes en faveur de Charles Ier. Maintenant qu'ils sont coupables de complot contre l'Angleterre, Votre Honneur veut-il me les donner tous les quatre?

– Prenez-les, dit Cromwell.

Mordaunt s'inclina avec un sourire de triomphale férocité.

– Mais, dit Cromwell, voyant que Mordaunt s'apprêtait à le remercier, revenons, s'il vous plaît, à ce malheureux Charles. A- t-on crié parmi le peuple?

– Fort peu, si ce n'est: «Vive Cromwell!»

– Où étiez-vous placé?

Mordaunt regarda un instant le général pour essayer de lire dans ses yeux s'il faisait une question inutile et s'il savait tout.

Mais le regard ardent de Mordaunt ne put pénétrer dans les sombres profondeurs du regard de Cromwell.

– J'étais placé de manière à tout voir et à tout entendre, répondit Mordaunt.

Ce fut au tour de Cromwell de regarder fixement Mordaunt et au tour de Mordaunt de se rendre impénétrable. Après quelques secondes d'examen, il détourna les yeux avec indifférence.

– Il paraît, dit Cromwell, que le bourreau improvisé a fort bien fait son devoir. Le coup, à ce qu'on m'a rapporté du moins, a été appliqué de main de maître.

Mordaunt se rappela que Cromwell lui avait dit n'avoir aucun détail, et il fut dès lors convaincu que le général avait assisté à l'exécution, caché derrière quelque rideau ou quelque jalousie.

– En effet, dit Mordaunt d'une voix calme et avec un visage impassible, un seul coup a suffi.

– Peut-être, dit Cromwell, était-ce un homme du métier.

– Le croyez-vous, monsieur?

– Pourquoi pas?

– Cet homme n'avait pas l'air d'un bourreau.

– Et quel autre qu'un bourreau, demanda Cromwell, eût voulu exercer cet affreux métier?

– Mais, dit Mordaunt, peut-être quelque ennemi personnel du roi Charles, qui aura fait voeu de vengeance et qui aura accompli ce voeu, peut-être quelque gentilhomme qui avait de graves raisons de haïr le roi déchu, et qui, sachant qu'il allait fuir et lui échapper, s'est placé ainsi sur sa route, le front masqué et la hache à la main, non plus comme suppléant du bourreau, mais comme mandataire de la fatalité.

– C'est possible, dit Cromwell.

– Et si cela était ainsi, dit Mordaunt, Votre Honneur condamnerait-il son action?

– Ce n'est point à moi de juger, dit Cromwell. C'est une affaire entre lui et Dieu.

– Mais si Votre Honneur connaissait ce gentilhomme?

– Je ne le connais pas, monsieur, répondit Cromwell, et ne veux pas le connaître. Que m'importe à moi que ce soit celui-là ou un autre? Du moment où Charles était condamné, ce n'est point un homme qui a tranché la tête, c'est une hache.

– Et cependant, sans cet homme, dit Mordaunt, le roi était sauvé.

Cromwell sourit.

– Sans doute, vous l'avez dit vous-même, on l'enlevait.

– On l'enlevait jusqu'à Greenwich. Là il s'embarquait sur une felouque avec ses quatre sauveurs. Mais sur la felouque étaient quatre hommes à moi, et cinq tonneaux de poudre à la nation. En mer, les quatre hommes descendaient dans la chaloupe, et vous êtes déjà trop habile politique, Mordaunt, pour que je vous explique le reste.

– Oui, en mer ils sautaient tous.

– Justement. L'explosion faisait ce que la hache n'avait pas voulu faire. Le roi Charles disparaissait anéanti. On disait qu'échappé à la justice humaine, il avait été poursuivi et atteint par la vengeance céleste; nous n'étions plus que ses juges et c'était Dieu qui était son bourreau. Voilà ce que m'a fait perdre votre gentilhomme masqué, Mordaunt. Vous voyez donc bien que j'avais raison quand je ne voulais pas le connaître; car, en vérité, malgré ses excellentes intentions, je ne saurais lui être reconnaissant de ce qu'il a fait.

– Monsieur, dit Mordaunt, comme toujours je m'incline et m'humilie devant vous; vous êtes un profond penseur, et, continua- t-il, votre idée de la felouque minée est sublime.

– Absurde, dit Cromwell, puisqu'elle est devenue inutile. Il n'y a d'idée sublime en politique que celle qui porte ses fruits; toute idée qui avorte est folle et aride. Vous irez donc ce soir à Greenwich, Mordaunt, dit Cromwell en se levant; vous demanderez le patron de la felouque l'Éclair, vous lui montrerez un mouchoir blanc noué par les quatre bouts, c'était le signe convenu; vous direz aux gens de reprendre terre, et vous ferez reporter la poudre à l'arsenal, à moins que…

– À moins que… répondit Mordaunt, dont le visage s'était illuminé d'une joie sauvage pendant que Cromwell parlait.

– À moins que cette felouque telle qu'elle est ne puisse servir à vos projets personnels.

– Ah! milord, milord! s'écria Mordaunt, Dieu, en vous faisant son élu, vous a donné son regard, auquel rien ne peut échapper.

– Je crois que vous m'appelez milord! dit Cromwell en riant. C'est bien, parce que nous sommes entre nous, mais il faudrait faire attention qu'une pareille parole ne vous échappât devant nos imbéciles de puritains.

– N'est-ce pas ainsi que Votre Honneur sera appelé bientôt?

– Je l'espère du moins, dit Cromwell, mais il n'est pas encore temps.

Cromwell se leva et prit son manteau.

– Vous vous retirez, monsieur, demanda Mordaunt.

– Oui, dit Cromwell, j'ai couché ici hier et avant-hier, et vous savez que ce n'est pas mon habitude de coucher trois fois dans le même lit.

– Ainsi, dit Mordaunt, Votre Honneur me donne toute liberté pour la nuit?

Et même pour la journée de demain si besoin est, dit Cromwell. Depuis hier soir, ajouta-t-il en souriant, vous avez assez fait pour mon service, et si vous avez quelques affaires personnelles à régler, il est juste que je vous laisse votre temps.

– Merci, monsieur; il sera bien employé, je l'espère.

Cromwell fit à Mordaunt un signe de la tête; puis, se retournant:

– Êtes-vous armé? demanda-t-il.

– J'ai mon épée, dit Mordaunt.

– Et personne qui vous attende à la porte?

– Personne.

– Alors vous devriez venir avec moi, Mordaunt.

– Merci, monsieur; les détours que vous êtes obligé de faire en passant par le souterrain me prendraient du temps, et, d'après ce que vous venez de me dire, je n'en ai peut-être que trop perdu. Je sortirai par l'autre porte.

– Allez donc, dit Cromwell.

Et posant la main sur un bouton caché, il fit ouvrir une porte si bien perdue dans la tapisserie qu'il était impossible à l'oeil le plus exercé de la reconnaître.

Cette porte, mue par un ressort d'acier, se referma sur lui.

C'était une de ces issues secrètes comme l'histoire nous dit qu'il en existait dans toutes les mystérieuses maisons qu'habitait Cromwell.

Celle-là passait sous la rue déserte et allait s'ouvrir au fond d'une grotte, dans le jardin d'une autre maison située à cent pas de celle que le futur protecteur venait de quitter.

C'était pendant cette dernière partie de la scène, que, par l'ouverture que laissait un pan du rideau mal tiré, Grimaud avait aperçu les deux hommes et avait successivement reconnu Cromwell et Mordaunt.

On a vu l'effet qu'avait produit la nouvelle sur les quatre amis.

D'Artagnan fut le premier qui reprit la plénitude de ses facultés.

– Mordaunt, dit-il; ah! par le ciel! c'est Dieu lui-même qui nous l'envoie.

– Oui, dit Porthos, enfonçons la porte et tombons sur lui.

– Au contraire, dit d'Artagnan, n'enfonçons rien, pas de bruit, le bruit appelle du monde; car, s'il est, comme le dit Grimaud, avec son digne maître, il doit y avoir, caché à une cinquantaine de pas d'ici, quelque poste des côtes de fer. Holà! Grimaud, venez ici, et tâchez de vous tenir sur vos jambes.

Grimaud s'approcha. La fureur lui était revenue avec le sentiment, mais il était ferme.

– Bien, continua d'Artagnan. Maintenant montez de nouveau à ce balcon, et dites-nous si le Mordaunt est encore en compagnie, s'il s'apprête à sortir ou à se coucher; s'il est en compagnie, nous attendrons qu'il soit seul; s'il sort, nous le prendrons à la sortie; s'il reste, nous enfoncerons la fenêtre. C'est toujours moins bruyant et moins difficile qu'une porte.

Grimaud commença à escalader silencieusement la fenêtre.

– Gardez l'autre issue, Athos et Aramis; nous restons ici avec

Porthos.

Les deux amis obéirent.

– Eh bien! Grimaud! demanda d'Artagnan.

– Il est seul, dit Grimaud.

– Tu en es sûr?

– Oui.

– Nous n'avons pas vu sortir son compagnon.

– Peut-être est-il sorti par l'autre porte.

– Que fait-il?

– Il s'enveloppe de son manteau et met ses gants.

– À nous! murmura d'Artagnan.

Porthos mit la main à son poignard, qu'il tira machinalement du fourreau.

– Rengaine, ami Porthos, dit d'Artagnan, il ne s'agit point ici de frapper d'abord. Nous le tenons, procédons avec ordre. Nous avons quelques explications mutuelles à nous demander, et ceci est un pendant de la scène d'Armentières; seulement, espérons que celui-ci n'aura point de progéniture, et que, si nous l'écrasons, tout sera bien écrasé avec lui.

– Chut! dit Grimaud; le voilà qui s'apprête à sortir. Il s'approche de la lampe. Il la souffle. Je ne vois plus rien.

– À terre, alors, à terre!

Grimaud sauta en arrière et tomba sur ses pieds. La neige assourdissait le bruit. On n'entendit rien.

– Va prévenir Athos et Aramis qu'ils se placent de chaque côté de la porte, comme nous allons faire Porthos et moi; qu'ils frappent dans leurs mains s'ils le tiennent, nous frapperons dans les nôtres si nous le tenons.

Grimaud disparut.

– Porthos, Porthos, dit d'Artagnan, effacez mieux vos larges épaules, cher ami; il faut qu'il sorte sans rien voir.

– Pourvu qu'il sorte par ici!

– Chut! dit d'Artagnan.

Porthos se colla contre le mur à croire qu'il y voulait rentrer.

D'Artagnan en fit autant.

On entendit alors retentir le pas de Mordaunt dans l'escalier sonore. Un guichet inaperçu glissa en grinçant dans son coulisseau. Mordaunt regarda, et, grâce aux précautions prises par les deux amis, il ne vit rien. Alors il introduisit la clef dans la serrure; la porte s'ouvrit et il parut sur le seuil.

Au même instant, il se trouva face à face avec d'Artagnan.

Il voulut repousser la porte. Porthos s'élança sur le bouton et la rouvrit toute grande.

Porthos frappa trois fois dans ses mains. Athos et Aramis accoururent.

Mordaunt devint livide, mais il ne poussa point un cri, mais n'appela point au secours.

D'Artagnan marcha droit sur Mordaunt, et, le repoussant pour ainsi dire avec sa poitrine, lui fit remonter à reculons tout l'escalier, éclairé par une lampe qui permettait au Gascon de ne pas perdre de vue les mains de Mordaunt; mais Mordaunt comprit que, d'Artagnan tué, il lui resterait encore à se défaite de ses trois autres ennemis. Il ne fit donc pas un seul mouvement de défense, pas un seul geste de menace. Arrivé à la porte, Mordaunt se sentit acculé contre elle, et sans doute il crut que c'était là que tout allait finir pour lui; mais il se trompait, d'Artagnan étendit la main et ouvrit la porte. Mordaunt et lui se trouvèrent donc dans la chambre où dix minutes auparavant le jeune homme causait avec Cromwell.

 

Porthos entra derrière lui; il avait étendu le bras et décroché la lampe du plafond; à l'aide de cette première lampe il alluma la seconde.

Athos et Aramis parurent à la porte, qu'ils refermèrent à clef.

– Prenez donc la peine de vous asseoir, dit d'Artagnan en présentant un siège au jeune homme.

Celui-ci prit la chaise des mains de d'Artagnan et s'assit, pâle mais calme. À trois pas de lui, Aramis approcha trois sièges pour lui, d'Artagnan et Porthos.

Athos alla s'asseoir dans un coin, à l'angle le plus éloigné de la chambre, paraissant résolu de rester spectateur immobile de ce qui allait se passer.

Porthos s'assit à la gauche et Aramis à la droite de d'Artagnan.

Athos paraissait accablé. Porthos se frottait les paumes des mains avec une impatience fiévreuse.

Aramis se mordait, tout en souriant, les lèvres jusqu'au sang.

D'Artagnan seul se modérait, du moins en apparence.

– Monsieur Mordaunt, dit-il au jeune homme, puisque, après tant de jours perdus à courir les uns après les autres, le hasard nous rassemble enfin, causons un peu, s'il vous plaît.

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