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Derniers essais de littérature et d'esthétique: août 1887-1890

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Poésie et Prison 35

La prison a produit un admirable effet sur M. Wilfrid Blunt poète36.

Les Sonnets d'amour de Proteus, en dépit de leurs ingénieuses modernités à la Musset, de leur esprit rapide et brillant, n'étaient tout au plus qu'affectés ou fantaisistes.

Il n'y avait là que les souvenirs d'humeurs, de moments transitoires, tantôt de mélancolie, tantôt de douceur, et assez souvent ils étaient susceptibles de faire rougir.

Leur sujet n'avait rien d'élevé. Ils n'avaient pas de portée sérieuse.

On y trouvait bien des choses capricieuses et faibles.

D'un autre côté, In Vinculis37 est un livre qui nous remue par la belle sincérité de son objet, sa pensée hautaine et passionnée, la profondeur et l'ardeur dans l'intensité du sentiment.

«L'emprisonnement, dit dans sa préface M. Blunt, est une réalité de discipline fort utile pour l'âme moderne, bercée qu'elle est par la paresse et le laisser-aller physique. Ainsi qu'une maladie ou une retraite spirituelle, il purifie et ennoblit, et l'âme en émerge plus forte et plus concentrée en soi».

Certainement l'emprisonnement fut pour lui une manière de purification.

Les sonnets du début, composés dans la morne cellule de la prison de Galway et écrits sur les feuillets de garde du livre de prières du prisonnier, sont pleins de choses noblement pensées, noblement exprimées, et montrent que, si M. Balfour peut imposer le «régime de droit commun par ses réglements sur les prisons», il ne saurait empêcher «la hauteur de pensée», non plus que limiter, gêner en quoi que ce soit la liberté d'une âme d'homme.

Ce sont naturellement des œuvres d'une personnalité intense dans son expression.

Il ne pouvait en être autrement.

Mais la personnalité qu'elles révèlent n'a rien de mesquin, rien de bas.

Le cri pétulant de l'égoïste superficiel qui était la marque caractéristique des Sonnets d'amour de Proteus ne se trouve plus ici.

Il a fait place à une douleur ardente, à un dédain terrible, à une rage farouche, à une passion pareille à la flamme.

Un sonnet comme le suivant jaillit vraiment du foyer d'un cœur et d'un cerveau en feu:

 
Dieu le sait, ce ne fut point d'après un plan mûri d'avance
que je quittai le confortable séjour de ma paix,
et que je cherchai cette lutte contre l'Impie,
et que sans trêve, pendant des années qui ne cessent point,
 
 
j'ai guerroyé avec les Puissances et les Principautés.
L'âme que m'a faite la Nature, avant l'heure de ces querelles,
était comme une sœur soucieuse de plaire,
aimant tout, et par-dessus tout, le clan des hommes.
 
 
Dieu le sait. Et il sait combien les larmes de l'Univers,
me touchèrent. Et il est témoin de ma colère,
sait comment elle s'alluma contre les meurtriers
 
 
qui assassinaient pour de l'or, et comment sur leur route
j'allai à leur rencontre. Et depuis ce jour-là, le monde en armes
frappe droit à ma vie avec des colères et des alarmes.
 

Et le sonnet que voici a toute la force étrange de ce désespoir qui n'est que le prélude d'une espérance plus vaste:

 
Je croyais accomplir un exploit de chevalerie,
un acte de valeur, qui peut-être, aux yeux de celle
qui fut ma maîtresse, laisserait un souvenir,
comme parmi les nations. Et lorsqu'ainsi la bataille
 
 
faiblit, et que des hommes jadis hardis, la figure blême,
se tournèrent çà et là, cherchant des excuses à leur fuite,
seul, je tins ferme, et par la supériorité de l'agresseur
je fus accablé et mutilé cruellement.
 
 
Alors je me traînai à ses pieds, devant celle dont la cause chérie
m'avait engagé dans ces hasards, et je lui dis: «Regarde,
les blessures que je reçus pour toi dans ces guerres».
 
 
Mais elle: «Pauvre estropié, crois-tu donc que j'épouserais
un tronc sans membres?..» Elle rit et se détourna de moi.
Pourtant elle était belle et se nommait «La Liberté».
 

Le sonnet qui commence ainsi:

 
Une prison est un couvent sans Dieu:
Pauvreté, chasteté, obéissance.
Voilà ses règles
 

est très beau, de même que le suivant, écrit aussitôt après avoir franchi la porte de la prison:

 
Nu j'entrai dans le monde de plaisir,
Et nu j'entre en cette maison de souffrance.
Ici, à cette porte je dépose le trésor de ma vie,
mon orgueil, mes vêtements, et le nom que je portais parmi les hommes.
 
 
Désormais le monde et moi nous serons comme deux.
Aucun bruit de moi ne percera, pour le bien ou le mal,
ces murs de douleur, ni je n'entendrai le vain
rire et les larmes de ceux qui m'aiment encore.
 
 
Ici quelle vie nouvelle m'attend? Peu d'aise,
une froide couche, des nuits sans sommeil,
les ordres d'une voix dure, aucune voix qui apaise, qui plaise.
 
 
Pour amis, de pauvres voleurs, pour livres des réglements sans signification.
Cela, c'est la tombe, – non c'est l'enfer. Pourtant, ô Seigneur de puissance
mon esprit, dans la lumière, verra encore la lumière.
 

Mais disons-le, tous les sonnets méritent d'être lus, et le Canon d'Aughrim la plus longue pièce du livre, est une description de main de maître, une description dramatique de la vie tragique du paysan irlandais.

La littérature ne doit pas grande reconnaissance à M. Balfour pour sa sophistique Apologie du doute philosophique, un des livres les plus ternes que nous connaissions, mais il faut reconnaître qu'en envoyant M. Blunt en prison, il a fait d'un rimeur habile un poète plein de gravité et de pensée profonde.

L'enceinte étroite de la cellule de prison semble bien en rapport avec l'étroit espace de terrain dont dispose le sonnet, et un injuste emprisonnement pour une noble cause donne à la nature de la force autant que de la profondeur.

L'Évangile selon Walt Whitman 38

«Nul ne comprendra mes vers, s'il tient à y voir une œuvre littéraire… ou s'il vise uniquement l'art et l'esthétique. Brins d'herbe… a été avant tout l'efflorescence de ma nature émotionnelle et d'une autre nature personnelle, – une tentative, depuis le commencement jusqu'à la fin, de fixer une Personne, un être humain, (moi-même dans la seconde moitié du dix-neuvième siècle, en Amérique) librement, pleinement, sincèrement. Je n'ai pu découvrir dans la littérature en cours aucune autre peinture analogue qui me satisfit».

C'est en ces termes que Walt Whitman nous définit la véritable attitude que nous devrions prendre en face de son œuvre.

Il a, en effet, une vue bien plus saine de la valeur et du sens de cette œuvre que ne peuvent se vanter de la posséder soit ses éloquents admirateurs, soit ses bruyants détracteurs.

Son dernier ouvrage: «Brindilles de Novembre», – tel est le titre qu'il lui donne, – publié dans l'hiver de la vie du vieillard, nous révèle, non point à vrai dire, la tragédie d'une âme, car la dernière note en est une de joie et d'espoir, et de noble, d'invincible foi en tout ce qui est beau et digne d'une telle foi, – mais à coup sûr, le drame d'une âme humaine.

Il expose avec une simplicité pénétrée à la fois de douceur et de force, le récit de son développement spirituel, du but et du motif qui ont donné à son œuvre sa manière et son sujet.

Son étrange mode d'expression apparaît en ces pages, comme le résultat d'un choix délibéré en pleine conscience.

Le «barbare coup de gosier» qu'il a jeté par-dessus «les toits du monde», il y a bien des années, et qui arracha aux lèvres de M. Swinburne un si hautain panégyrique en vers et une censure aussi bruyante en prose, se montre ainsi sous un jour qui sera entièrement nouveau pour plus d'un.

 

En effet, Walt Whitman est artiste presque dans son parti-pris d'écarter l'art.

Il s'est efforcé de produire un certain effet par certains moyens, et il a réussi.

Il y a bien de la méthode dans ce que beaucoup de gens ont appelé sa folie, et certains se figureront peut-être en effet qu'il y en a trop.

Dans l'histoire de sa vie, telle qu'il nous la raconte, nous le trouvons, à l'âge de seize ans, commençant une étude précise et philosophique de la littérature.

«En été et en automne, j'avais l'habitude d'aller passer, une semaine, sans interruption, à la campagne, ou sur les rives de Long-Island.

«Là, en présence des influences de plein air, je parcourus, d'un bout à l'autre, l'Ancien et le Nouveau Testament, et j'absorbai, (probablement d'une manière plus avantageuse pour moi, que je ne l'eusse fait dans une bibliothèque, ou dans une chambre close – il y a tant de différence, selon l'endroit où on lit) Shakespeare, Ossian, les meilleures traductions que je pus me procurer d'Homère, d'Eschyle, de Sophocle, les vieux Nibelungen allemands, les antiques poèmes hindous, et un ou deux autres chefs-d'œuvre, entre autres celui du Dante.

«Le hasard fit que je lus la plus grande partie de ce dernier dans une vieille forêt.

«Pour l'Iliade… je la lus pour la première fois d'un bout à l'autre sur la presqu'île d'Orient, à l'extrêmité Nord-Est de Long-Island, dans un creux de rocher et de sable abrité, la mer de chaque côté.

«Depuis je me suis demandé pourquoi je n'ai point été accablé par ces maîtres puissants.

«C'est probablement parce que je les lisais, ainsi que je l'ai décrit, bien face à face avec la Nature, en plein soleil, devant la vaste perspective d'un paysage pittoresque, ou des flots de la mer».

L'amusante boutade de dogmatisme, où Edgar Allan Poë nous dit qu'étant donné nos occasions et notre époque, «il ne peut rien y avoir de mieux qu'un poème» le fascina.

«Déjà la même pensée m'avait hanté l'esprit, dit-il… mais l'argument de Poë acheva l'œuvre et me la démontra».

La traduction anglaise de la Bible paraît lui avoir suggéré la possibilité d'une forme poétique qui, tout en retenant l'esprit de la poésie, serait affranchie des entraves de la rime, et de tout système défini de métrique.

Après avoir déterminé jusqu'à un certain point ce qu'on pourrait appeler la technique du Whitmanisme, il se mit à rêver profondément sur la nature de cet esprit qui devait donner la vie à cette forme étrange.

Le point central de la poésie à venir lui sembla être nécessairement, «une identité de corps et d'âme, une personnalité», laquelle personnalité, ainsi qu'il nous le dit franchement «serait moi-même, ce que je décidai après maintes considérations et réflexions».

Toutefois il fallait un stimulus nouveau pour créer, pour révéler réellement cette personnalité, sentie d'abord d'une façon très vague.

Cela se fit grâce à la guerre civile.

Après avoir décrit les nombreux rêves, les passions de son adolescence et des débuts de son âge viril, il reprend:

«Néanmoins ces choses-là et bien d'autres encore n'auraient peut-être abouti à rien, s'il ne m'avait pas été donné pour une nouvelle expression nationalement déclamatoire un stimulus brusque, vaste, terrible, direct et indirect.

«Il est certain, dis-je, que j'avais déjà fait quelques pas, que seule l'explosion de la guerre de Sécessions, ce qu'elle me montra, comme à la lueur des éclairs, que les profondeurs émotionnelles qu'elle sonda et agita (naturellement pas dans mon cœur seul, je l'entends bien, mais dans des millions d'autres, comme je le vis clairement), l'éclat aveuglant, la provocation des tableaux de cette guerre, de ses scènes, furent les raisons finales d'existence d'une poésie autochthone et passionnée.

«Je descendis sur les champs de bataille de la Virginie… Désormais je vécus dans le camp, – je vis de grands combats, et les jours et les nuits qui les suivirent, – je participai à toutes les fluctuations, à la sombre tristesse, au désespoir, au réveil de nouveaux espoirs, au retour du courage – la mort affrontée avec empressement, – à la cause aussi, – à la durée et aux faits de ces années d'agonie et de jours livides, – vraies années de parturition de cette Union désormais homogène.

«Sans ces deux ou trois ans et les épreuves qu'elles firent traverser, les Brins d'herbes n'auraient pas vu le jour».

Ayant ainsi obtenu le stimulus nécessaire pour faire vivre et animer ce moi personnel, qui un jour ou l'autre aurait à prendre l'universalité, il chercha à découvrir de nouveaux accents poétiques, et allant plus loin que la simple passion pour l'expression, il visa à la «suggestivité» tout d'abord.

«Je finis, je polis peu, ou pas du tout, et je ne le pouvais pas en restant conséquent avec mon plan.

«Le lecteur ou la lectrice auront leur part de travail, tout comme j'ai eu le mien.

«Je ne cherche pas tant à constater, à développer un thème, une pensée, qu'à vous porter, lecteur, dans l'atmosphère du thème, ou de la pensée, – pour que vous poursuiviez votre propre vol.»

Un autre mot-tremplin est Camaraderie et d'autres mots-signes Bonne chère, Contentement, Espoir.

C'était l'individualité que Walt Whitman cherchait particulièrement.

«Du commencement jusqu'à la fin, j'ai fait porter l'effort de mes poésies sur l'individualité américaine, pour l'assister, – non seulement parce qu'elle est une grande leçon dans la nature, dans l'ensemble de ses lois généralisantes, mais encore comme contrepoids aux tendances niveleuses de la démocratie – et pour d'autres raisons.

«Me défiant des conventions ostensibles littéraires et autres, je chante franchement «le grand orgueil que l'homme ressent de lui-même» et j'en fais plus ou moins le motif de presque tous mes vers.

«Je crois cet orgueil indispensable à tout Américain.

«Je ne le juge point incompatible avec l'obéissance, l'humilité, la déférence et le doute de soi».

Il fallait aussi trouver un thème nouveau dans la relation des sexes, conçue sous une forme naturelle, simple et saine, et M. Walt Whitman proteste contre la tentative que fit le pauvre M. William Rossetti pour traiter son vers à la Bowdler39 et l'expurger.

«A un autre point de vue, les Brins d'herbes sont franchement le poème de l'amour et de la faculté d'aimer – bien que des sens, qui, d'ordinaire, n'accompagnent point ces mots, soient toujours derrière eux et doivent se montrer en temps opportun, et tous sont l'objet d'un effort pour les soulever jusqu'en une atmosphère et une lumière différente.

«Au sujet de ce trait rendu intentionnellement palpable dans quelques vers, je dirai seulement que le principe qui s'applique à ces vers donne si bien le souffle à toute entreprise que la presque totalité de mes poésies auraient pu n'être jamais écrites, si ces vers en avaient été omis…

«Si certains faits et symptômes de sociétés sont universels… rien n'est plus rare dans les conventions et dans la poésie moderne, que leur acceptation normale.

«La littérature mande sans cesse le médecin pour le consulter, pour se confesser, et sans cesse elle recourt aux faux-fuyants, aux langes des suppressions au lieu de cette «héroïque nudité» qui seule peut servir de base à un diagnostic sincère.

«Et en ce qui concerne les éditions futures des Brins d'herbes (s'il y en a) je profite de l'occasion présente pour donner à ces lignes la confirmation définitive de convictions, de répétitions volontaires après trente ans, et pour y interdire ici-même, autant qu'un mot de moi peut le faire, toute mutilation».

Mais au-delà de tous ces accents, éclats d'âme, motifs, il y a le hautain courage qui fait accepter avec grandeur et franchise toutes les choses qui méritent d'exister.

Il désirait, dit Walt Whitman, «formuler un poème où chaque pensée, chaque fait, serait strictement ou indirectement, ou impliquerait, une croyance formelle en la sagesse, la santé, le mystère, la beauté de tout ce qui s'accomplit, de tout objet concret, de toute existence humaine ou autre, en se plaçant au point de vue non seulement de tous, mais de chacun».

Ses deux assertions finales sont que «la poésie vraiment grande est toujours… le résultat d'un esprit national, et non le privilège du petit nombre des gens cultivés, de l'élite» et que «les chants les plus forts et les plus doux ne se sont pas encore fait entendre».

Telles sont les vues contenues dans l'Essai du début: «Regard en arrière sur les routes parcourues», ainsi qu'il l'intitule.

Mais il y a dans cet attrayant volume un grand nombre d'autres essais, quelques-uns sur des poètes, comme Burns et Lord Tennyson, pour lesquels Walt Whitman professe une admiration profonde; ou sur des acteurs et chanteurs d'autrefois (Booth l'aîné, Forest, l'Alboni et Mario sont ses principaux favoris) ou sur les Indigènes Indiens, sur l'élément espagnol dans la nationalité américaine, sur le slang de l'Ouest, sur la poésie de la Bible, et sur Abraham Lincoln.

Mais Walt Whitman n'est jamais mieux dans son élément que quand il analyse lui-même son œuvre et fait des plans pour la poésie de l'avenir.

Pour lui, la littérature a un but social nettement défini.

Il cherche à construire les masses, en «construisant» de grandes «individualités».

Et cependant la littérature elle-même doit être précédée par de nobles formes de vie.

«La meilleure littérature est toujours le résultat de quelque chose de plus grand qu'elle.

«Elle est non pas le héros, mais le portrait du héros.»

Avant qu'il y ait de l'histoire ou un poème à enregistrer, il faut que des faits se soient accomplis.

Assurément, il y a dans les idées de Walt Whitman une large vision, une vigoureuse santé, un bel idéal éthique.

Il ne doit nullement être rangé parmi les littérateurs professionnels de son pays, les romanciers de Boston, les poètes de New-York, etc.

Il occupe une place à part, et la valeur principale de son œuvre est dans ce qu'il prophétise, non dans ce qu'il accomplit.

Il a commencé un prélude à des thèmes plus amples.

Il est le héraut d'une ère nouvelle.

En tant qu'homme, il est le précurseur d'un type futur.

Il est un facteur dans l'évolution héroïque et spirituelle de l'être humain.

Si la Poésie a passé à côté de lui, la philosophie lui accordera son attention.

Le Nouveau Président 40

Dans un petit livre qu'il intitule l'Île Enchantée, M. Wyke Bayliss, le nouveau président de la Société Royale des Artistes Anglais a donné au monde son évangile de l'art.

Son prédécesseur, dans cette fonction, a également donné un évangile de l'art, mais cet évangile prenait d'ordinaire la forme d'une autobiographie.

M. Whistler écrivait toujours l'Art, et si nous nous en souvenons bien, il l'écrit encore avec un A majuscule.

Mais il n'était jamais terne; le brillant de son esprit, la causticité de sa satire, ses amusantes épigrammes, – peut-être préférerions-nous le mot d'épitaphes, – à l'adresse de ses contemporains, rendaient ses appréciations aussi agréables que décevantes, aussi charmantes que malsaines.

En outre, il introduisit l'humour américain dans la critique d'art, et pour cette seule raison, quand il n'y en aurait pas d'autre, il mérite un souvenir affectueux.

D'autre part, M. Wyke Bayliss est assez ennuyeux.

Le dernier président n'a jamais émis des idées vraies, mais le président actuel ne dit jamais rien de neuf, et si l'art est une forêt hantée par les fées, ou bien une île enchantée, nous devons avouer notre préférence en faveur du vieux Puck sur le nouveau Prospero.

L'eau est une chose admirable – du moins les Grecs l'ont dit – et M. Ruskin était un admirable écrivain, mais la combinaison de l'un et de l'autre est plutôt accablante.

Néanmoins il n'est que juste de dire que M. Wyke Bayliss, en ses bons moments, écrit fort bien l'anglais.

 

M. Whistler, pour telle ou telle raison, employait constamment le langage des petits Prophètes.

Peut-être le faisait-il pour bien marquer ses prétentions si connues à l'inspiration verbale.

Peut-être croyait-il avec Voltaire, qu'Habakkuk était capable de tout et tenait-il à s'abriter derrière l'égide d'un écrivain parfaitement irresponsable, dont aucune prophétie ne s'est accomplie, au dire du philosophe français.

C'était, dans le début, une idée assez ingénieuse, mais à la longue on trouva le procédé monotone.

L'esprit des Hébreux est excellent, mais leur genre de style n'est point à imiter, et une quantité quelconque de plaisanteries américaines ne suffirait pas pour lui donner cette modernité qu'exige, avant tout, un bon style littéraire.

Si admirables que soient sur la toile les feux d'artifice de Whistler, ses feux d'artifice en prose ont de la brusquerie, de la violence, de l'exagération.

Toutefois, depuis le temps de la Pythie, les oracles n'ont jamais été remarquables par le style, et le modeste M. Wyke Bayliss est aussi supérieur comme écrivain à M. Whistler qu'il lui est inférieur comme peintre et artiste.

A vrai dire, il y a dans ce livre quelques passages écrits d'une façon si charmante, en phrases si heureusement tournées, qu'il nous faut reconnaître que le Président des Artistes Anglais, ainsi qu'un président encore plus fameux de notre temps, sait mieux s'exprimer par l'entremise de la littérature, qu'en recourant à la ligne et à la couleur.

Mais ceci s'applique uniquement à la prose de M. Wyke Bayliss.

Sa poésie est très mauvaise, et les sonnets qui terminent le livre sont presque aussi médiocres que les dessins dont ils sont accompagnés.

Leur lecture nous oblige à regretter que sur ce point tout au moins, M. Wyke Bayliss n'ait point suivi l'exemple prudent de son prédécesseur, qui, avec tous ses défauts, ne commit jamais la faute d'écrire un seul vers, et qui, d'ailleurs, est bien incapable de faire quoi que ce soit en ce genre.

Quant au sujet des propos de M. Wyke Bayliss, il faut reconnaître que ses vues sur l'art sont au dernier point banales et vieillottes.

A quoi bon dire aux Artistes qu'ils doivent s'efforcer de peindre la Nature telle qu'elle est réellement.

Ce qu'est réellement la Nature est une question de métaphysique et non d'art.

L'art s'occupe des apparences, et l'œil de l'homme qui contemple la Nature, et devons-nous dire, la vision de l'artiste, nous importe bien plus que l'objet sur lequel il est dirigé.

Il y a bien plus de vérité dans l'aphorisme de Corot qu'un paysage est simplement: «un état d'âme» que dans toutes les laborieuses recherches de M. Bayliss sur le naturalisme.

Et de plus, pourquoi M. Bayliss gaspille-t-il tout un chapitre à faire remarquer des ressemblances réelles ou supposées entre un livre publié par lui, il y a une douzaine d'années, et un article de M. Palgrave paru récemment dans le Nineteenth Century?

Ni le livre, ni l'article ne contiennent rien de vraiment intéressant, et les passages parallèles, une centaine ou davantage que M. Wyke Bayliss imprime solennellement côte à côte, sont pour la plupart comme les lignes parallèles, qui ne se rencontrent jamais.

La seule proposition originale que M. Bayliss ait à nous offrir, c'est que la Chambre des Communes devrait faire choix, chaque année, d'un événement de l'histoire nationale et contemporaine et le faire connaître aux artistes qui désigneraient l'un d'entre eux pour en faire un tableau.

C'est de cette façon que M. Bayliss croit que nous pourrions avoir un art historique, et il propose, comme exemple de ce qu'il veut dire, un tableau représentant Miss Florence Nightingale à Scutari, un tableau représentant l'inauguration du premier Bureau des Écoles de Londres, et une peinture de la Salle des Séances du Sénat à Cambridge, lors de la remise à la jeune fille graduée d'un diplôme, où elle serait «reconnue comme possédant la science du Merlin, tout en restant aussi belle que Viviane».

Certes, cette proposition témoigne des meilleures intentions, mais, sans parler du danger de laisser l'art historique à la merci d'une majorité dans la Chambre des Communes, qui ne manquerait pas de voter d'après sa manière de voir les choses, M. Bayliss n'a pas l'air de se douter qu'un grand événement n'est point nécessairement un sujet de peinture.

«Les événements décisifs du monde, ainsi qu'on l'a très bien dit, s'accomplissent dans l'intelligence,» et pour les Bureaux Scolaires, les cérémonies académiques, les salles d'hôpital, et le reste, on fera bien de les laisser aux artistes des journaux illustrés qui s'en tirent admirablement et les donnent exactement comme ils doivent être dessinés.

D'ailleurs, les tableaux qui représentent des événements contemporains, mariages royaux, revues navales ou autres faits analogues, et qui se voient chaque année à l'Académie, sont toujours extrêmement mauvais, tandis que ces mêmes sujets, traités en noir et blanc dans le Graphic ou le London News, sont excellents.

En outre, si nous tenons à comprendre l'histoire d'une nation par le moyen de l'art, c'est aux arts de l'imagination et de l'idéal que nous devons recourir, et non aux arts qui sont franchement imitatifs.

L'aspect visible de la vie ne contient plus désormais pour nous le secret de l'esprit de la vie.

Probablement il ne le contint jamais.

Et si le Banquet de Waterloo, par M. Barker, et le Mariage du Prince de Galles par M. Frith sont des exemples d'art historique légitime, moins ils contiennent d'art, mieux cela vaut.

Cependant M. Bayliss est plein de la foi la plus ardente et parle très gravement de portraits authentiques de Saint Jean, de Saint Pierre, de Saint Paul datant du premier siècle, et de l'établissement par les Israélites d'une école d'art dans le désert, école qu'aurait dirigé un certain Bezaleel, peu apprécié de nos jours.

Il écrit d'un style agréable et pittoresque, mais il ne devrait point parler de l'art.

L'art est pour lui un livre scellé.

35Pall Mall Gazette, 3 janvier 1889.
36Wilfrid Scawen Blunt, diplomate de 1858 à 1869. Après sa démission, il voyagea, soutint Arabi-Pacha (1882). En 1887, il prit part en Irlande au mouvement d'opposition à la Coercition et fut emprisonné à Galway et à Kilmainham pour avoir convoqué un meeting public dans le district de Woodford en 1888. C'est à la suite de cette incarcération qu'il publia In Vinculis (Note du traducteur.)
37In Vinculis, par Wilfrid Scawen Blunt, auteur du Vent et Tourbillon, des Sonnets d'amour de Proteus, etc., etc.
38Pall Mall Gazette, 25 janvier 1889, à propos des Brindilles de novembre.
39Thomas Bowdler (1735-1823), éditeur d'éditions expurgées des classiques. (Note du traducteur).
40Pall Mall Gazette, 26 janvier 1889.
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