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La San-Felice, Tome 05

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XC
LA NUIT

Sur les trois points où les Français ont attaqué Naples, on s'est battu avec le même acharnement. De toutes partes, les aides de camp arrivent au quartier général de la porte Capuana, et trouvent le bivac du général entre la via del Vasto et l'Arenaccia, derrière la double ligne de maisons qui brûlent.

Le général Dufresse, entre Aversa et Naples, a trouvé, sur un point où le chemin se rétrécit, un corps de dix ou douze mille lazzaroni avec six pièces de canon. Les lazzaroni étaient au pied d'une colline, les canons au sommet. Les hussards de Dufresse ont fait cinq charges sur eux sans parvenir à les entamer. Ils étaient si nombreux et si pressés, que les morts restaient debout, soutenus par les vivants.

Il a fallu les grenadiers chargeant à la baïonnette pour faire une trouée. Quatre pièces d'artillerie volante, dirigées par le général Éblé, ont, pendant trois heures, criblé de mitraille les lazzaroni; ils se sont réfugiés sur les hauteurs de Capodimonte, où Dufresse les attaquera demain.

Vers la fin du combat, un corps de patriotes, conduit par Schipani et Manthonnet, est venu se jeter dans les rangs du général Dufresse. Ils annoncent que Nicolino s'est emparé du fort Saint-Elme; mais il n'a que trente hommes et est bloqué par des milliers de lazzaroni, qui amassent des fascines pour mettre le feu aux portes, et qui apportent des échelles pour monter aux murailles. Ils se sont emparés du couvent de San-Martino, situé aux pieds des remparts du fort, ou plutôt les moines les ont appelés et leur ont ouvert les portes; des terrasses du couvent, ils font feu sur les murailles. Si Nicolino n'est pas secouru dans la nuit, le fort Saint-Elme sera incontestablement pris au point du jour.

Trois cents hommes, conduits par Hector Caraffa et les patriotes, s'ouvriront, pendant la nuit, un chemin jusqu'aux portes du fort Saint-Elme; deux cents renforceront la garnison, cent enlèveront aux lazzaroni le couvent de San-Martino.

Kellermann, après un combat acharné, s'est emparé des hauteurs de Capodichino; mais il n'a pas pu dépasser le Campo-Santo. Il lui à fallu enlever les unes après les autres à la baïonnette les masseries, les églises, les villas, qui toutes ont fait une résistance héroïque. La cavalerie, qui constitue sa principale force, lui a été inutile au milieu de cette multitude de collines qui bossellent le terrain. De son bivac, il voit s'étendre devant lui la longue rue de Foria, encombrée de lazzaroni; l'immense bâtiment de l'hospice des Pauvres les protége. On voit une lumière à chacune de ses fenêtres; le lendemain, toutes ces fenêtres cracheront des balles.

A la strada San-Giovanella, il y a une batterie de canons; au largo delle Pigne, un bivac en grande partie composé de soldats de l'armée royale. Deux pièces de canon défendent la montée du musée Borbonico, qui donne sur la grande rue de Tolède.

A l'aide de sa lunette, Kellermann voit les chefs qui parcourent les rues à cheval en encourageant leurs hommes. L'un de ces chefs est vêtu en capucin et monté sur un âne.

Mathieu Maurice et le chef de brigade Broussier se sont emparés des marais. Seulement, coupés par un réseau de fossés, ces marais ont dû être conquis avec des pertes considérables, les lazzaroni étant protégés par les mouvements du terrain, et les républicains attaquant à découvert. Ils sont arrivés jusqu'aux Granili, qu'on n'avait point songé à garder; ils ont coupé la route de Portici. Broussier est campé sur la plage de la Marinella; Mathieu Maurice, qui a été légèrement blessé au bras gauche, est au moulin de l'Inferno. Le lendemain, ils seront prêts à attaquer le pont de la Madeleine, tout resplendissant des cierges qui brûlent devant la statue de saint Janvier.

Des fenêtres des Granili, on distingue tout Naples, depuis la plage de la Marinella jusqu'à la hauteur du môle: la ville regorge de lazzaroni qui se préparent à la défense.

Championnet écoutait ce dernier rapport, lorsque tout à coup de grands cris s'élèvent derrière lui, et une fusillade éclate sur un immense cercle, dont une des extrémités touche à la route de Capoue et l'autre à l'Arenaccia. Les balles font voler les cendres du feu auquel se chauffe le général en chef.

En un instant, Championnet et Duhesme, Monnier et Thiébaut sont sur pied. Les trois mille hommes qui composent le corps d'armée du général en chef se forment en carré et font feu sur les assaillants, qu'ils ne connaissent pas encore.

Ce sont les insurgés de tous les villages que les Français ont traversés dans la journée qui se sont réunis et qui attaquent à leur tour; ils ont profité de l'obscurité et ont fait leur première décharge presque à bout portant.

La multiplicité des coups de fusil indique que l'on a affaire à un corps de quatre à cinq mille hommes au moins.

Mais, au milieu du pétillement de la fusillade, au-dessus des cris et des hurlements des lazzaroni, de l'autre côté de cette ligne qui menace, on entend battre la charge et sonner des trompettes, puis des feux de peloton admirablement nourris, qui annoncent l'approche d'une troupe régulière. Les lazzaroni, qui croyaient surprendre, étaient surpris.

D'où vient ce secours, aussi inattendu que l'attaque?

Championnet et Duhesme se regardent et s'interrogent inutilement.

Le tambour et les fanfares se rapprochent, les cris de «Vive la République!» répondent aux cris de «Vive la République!» Le général en chef s'écrie:

–Soldats! c'est Salvato et Villeneuve qui arrivent de Bénévent. Chargeons toute cette canaille, qui n'osera pas nous attendre, je vous en réponds.

Duhesme et Monnier changent leurs carrés en colonnes d'attaque, les chasseurs montent à cheval, tout s'ébranle d'un irrésistible mouvement. Les lazzaroni sont percés à jour par les hussards de Salvato et par les chasseurs de Thiébaut, par les baïonnettes de Duhesme et de Monnier, et, sur un monceau de morts, les deux troupes se rejoignent et s'embrassent au cri de «Vive la République!»

Championnet et Salvato échangent quelques paroles rapides. Comme toujours, Salvato est arrivé au bon moment et a révélé sa présence par un coup de tonnerre.

Il ira renforcer avec ses six cents hommes Mathieu Maurice et Broussier. Si la blessure de Mathieu Maurice est plus grave qu'on ne le croit, ou si ce général, toujours atteint, parce qu'il est toujours au premier rang, reçoit une nouvelle blessure, Salvato prendra le commandement.

Il portera au général Mathieu Maurice l'ordre d'attaquer le pont de la Madeleine au point du jour. Ce pont est défendu par les maisons crénelées de la Marine et du bourg de San-Loreto; derrière lui, il a pour le soutenir le fort del Carmine, défendu par six pièces de canon, par un bataillon d'Albanais et par des milliers de lazzaroni, auxquels s'est joint un millier de soldats revenus de Livourne.

Vers trois heures du matin, on réveilla Championnet, qui dormait dans son manteau.

Un aide de camp de Kellermann venait lui donner des nouvelles de l'expédition du château Saint-Elme.

Hector Caraffa, profitant de l'obscurité, s'était glissé à travers cette multitude de collines qui réunissent Capodimonte à Saint-Elme. Outre la difficulté du terrain, horriblement accidenté, il avait eu, pendant quatre heures de marche, un combat continuel à soutenir, souvent inégal, meurtrier toujours. Il lui avait fallu franchir cinq milles d'embuscades entassées les unes sur les autres, et, de plus, un quartier de Naples insurgé.

Arrivé sous le feu de Saint-Elme, – qui le soutenait de son mieux en tirant des coups de canon à poudre, de peur que les boulets ne se trompassent de but, et, croyant atteindre des ennemis, n'atteignissent des amis, – Hector Caraffa, au lieu de séparer ses hommes en deux bandes, avait réuni toutes ses forces, et, au moment où l'on croyait qu'il allait les porter sur le fort Saint-Elme, il s'était jeté sur la chartreuse de San-Martino. Les lazzaroni, qui ne s'attendaient point à l'attaque, essayèrent de se défendre, mais inutilement. Les patriotes, jaloux de montrer aux Français qu'ils ne le cédaient à personne en courage, s'élancèrent en avant de la colonne, et entrèrent les premiers aux cris de «Vive la République!» En moins de dix minutes, les lazzaroni furent chassés du couvent et les portes refermées sur les Français.

Cent, comme il était convenu, restèrent à la chartreuse; les deux autres cents, par la rampe del Petrio, montèrent au fort, dont les portes leur furent ouvertes, non-seulement comme à des alliés, mais encore comme à des libérateurs.

Nicolino faisait demander à Championnet de lui accorder l'honneur de donner, le lendemain, le signal du combat en faisant, au premier rayon du jour, tirer un coup de canon.

Cette faveur lui fut accordée, et le général envoya son aide de camp à tous les chefs de corps pour leur dire que le signal de l'attaque serait un coup de canon tiré par les patriotes napolitains du haut du fort Saint-Elme.

XCI
DEUXIÈME JOURNÉE

A six heures précises du matin, une ligne de feu raya le crépuscule au-dessus de la masse noire du château Saint-Elme, un coup de canon se fit entendre: le signal était donné.

Les trompettes et le tambour français y répondirent, et toutes les hauteurs plongeant sur les rues de Naples, garnies de canon pendant la nuit par le général Éblé, s'allumèrent à la fois.

A ce signal, les Français attaquèrent Naples sur trois points différents.

Kellermann, commandant l'extrême droite, se réunit à Dufresse, et attaqua Naples par Capodimonte et Capodichino. La double attaque devait aboutir à la porte de Saint-Janvier, strada Foria.

Le général Championnet devait, comme il l'avait dit la veille, enfoncer la porte Capuana, devant laquelle Thiébaut avait été fait général de brigade, et entrer dans la ville par la strada dei Tribunali et par San-Giovanni à Carbonara.

 

Enfin, Salvato, Mathieu Maurice et Broussier devaient, comme nous l'avons dit encore, forcer le pont de la Madeleine, s'emparer du château del Carmine; par la place du Vieux-Marché, remonter jusqu'à la strada dei Tribunali, et, par un autre courant qui suivrait le bord de la mer, pénétrer jusqu'au môle.

Les lazzaroni qui devaient défendre Naples du côté de Capodimonte et de Capodichino, étaient commandés par fra Pacifico; ceux qui défendaient la porte Capuana étaient commandés par notre ami Michel le Fou; enfin ceux qui défendaient le pont de la Madeleine et la porte del Carmine étaient commandés par son compère Pagliuccella.

Dans ces espèces de combats qui consistent non pas à prendre une ville d'assaut, mais à prendre d'assaut, et les unes après les autres, toutes les maisons d'une ville, une populace mutinée est bien autrement terrible qu'une troupe régulière. Une troupe régulière se bat mécaniquement, avec sang-froid, et, pour ainsi dire, avec le moins de frais possible 2 , tandis que, dans un combat comme celui que nous allons essayer de décrire, cette populace mutinée substitue aux mouvements stratégiques, faciles à repousser, parce qu'ils sont faciles à prévoir, les élans furieux des passions, l'opiniâtreté du délire, et les ruses de l'imagination individuelle.

Alors, ce n'est plus un combat, c'est une lutte à toute outrance, une boucherie, un carnage, un massacre dans lequel les assaillants sont forcés d'opposer l'entêtement du courage à la frénésie du désespoir; dans cette circonstance surtout, où dix mille Français attaquaient en face une population de cinq cent mille âmes, menacés sur leurs flancs et sur leurs derrières par la triple insurrection des Abruzzes, de la Capitanate et de la Terre de Labour; craignant de voir revenir par mer au secours de cette population et de cette insurrection une armée dont les débris pouvaient encore monter à quatre fois leur nombre, il s'agissait tout simplement, non plus de vaincre pour l'honneur, mais de vaincre pour sa propre conservation. César disait: «Dans toutes les batailles que j'ai livrées, j'ai combattu pour la victoire; à Munda, j'ai combattu pour la vie.» A Naples, Championnet pouvait dire comme César, et il fallait, pour ne pas mourir, vaincre comme César avait vaincu à Munda.

Les soldats le savaient: de la prise de Naples dépendait le salut de l'armée. Le drapeau français devait donc flotter sur Naples, flottât-il sur un monceau de cendres.

Par chaque compagnie, il y avait deux hommes portant des torches incendiaires préparées par l'artillerie. A défaut du canon, de la hache, de la baïonnette, le feu devait, comme dans les inextricables forêts de l'Amérique, – dans cet inextricable labyrinthe de ruelles et de vicoli, – le feu devait ouvrir un chemin.

Presque en même temps, c'est-à-dire vers sept heures du matin, Kellermann entrait, précédé de ses dragons, dans le faubourg de Capodimonte, Dufresse, à la tête de ses grenadiers, dans celui de Capodichino, Championnet enfonçait la porte Capuana, et Salvato, portant à la main le drapeau tricolore de la république italienne, c'est-à-dire bleu, jaune et noir, forçait le pont de la Madeleine, et voyait le canon del Carmine abattre autour de lui les premières files de ses hommes.

Il serait impossible de suivre ces trois attaques dans tous leurs détails. Les détails, d'ailleurs, sont les mêmes. Sur quelque point de la ville que les Français essayassent de s'ouvrir un passage, ils trouvaient la même résistance acharnée, inouïe, mortelle. Il n'y avait pas une fenêtre, pas une terrasse, pas un soupirail de cave qui n'eût ses défenseurs et qui ne vomît le feu et la mort. Les Français, de leur côté, s'avançaient, poussant leur artillerie devant eux, se faisant précéder par des torrents de mitraille, enfonçant les portes, éventrant les maisons, passant de l'une à l'autre, et laissant l'incendie sur leurs flancs et derrière eux. Ainsi, les maisons que l'on ne pouvait prendre étaient brûlées. Alors, du milieu d'un cratère de flammes, dont le vent poussait, comme un dôme funèbre, la fumée au-dessus de la ville, sortaient les imprécations d'agonie, les hurlements de mort des malheureux qui brûlaient vivants. Les rues présentaient l'aspect d'une voûte de feu sous laquelle roulait un fleuve de sang. Maîtres d'une formidable artillerie, les lazzaroni défendaient chaque place, chaque rue, chaque carrefour, avec une intelligence, une vigueur qu'était loin d'avoir soupçonnées l'armée de ligne; et, tour à tour repoussés ou agressifs, vaincus ou victorieux, se réfugiaient dans les ruelles sans cesser de combattre et reprenaient l'offensive avec l'énergie du désespoir et l'obstination du fanatisme.

Nos soldats, non moins acharnés à l'attaque qu'eux à la défense, les poursuivaient au milieu des flammes, qui semblaient devoir les dévorer, tandis que, pareils à des démons qui combattent dans leur élément naturel, ceux-ci, noircis et fumants, s'élançaient hors des maisons brûlantes pour revenir à la charge avec plus d'audace qu'auparavant. On combat, on marche, on avance, on recule sur un monceau de ruines. Les maisons qui s'écroulent écrasent les combattants; la baïonnette enfonce les masses, qui se resserrent, et qui offrent l'étrange spectacle d'un combat corps à corps entre trente mille combattants, ou plutôt trente mille combats dans lesquels les armes ordinaires deviennent inutiles. Nos soldats arrachent la baïonnette du canon de leur fusil et s'en servent comme de poignards, tandis que, de leurs fusils éteints et qu'ils n'ont pas le temps de recharger, ils font des massues. Les mains cherchent à étrangler, les dents à mordre, les poitrines à étouffer. Sur les cendres, sur les pierres, sur les charbons enflammés, dans le sang qui coule, rampent les blessés, qui, comme des serpents foulés aux pieds, déchirent en expirant. Le terrain est disputé pas à pas, et le pied, à chaque pas qu'il fait, se pose sur un mort ou un mourant.

Vers midi, un hasard fit qu'un nouveau renfort arriva aux lazzaroni. Dix mille des leurs, excités par les moines et par les prêtres, étaient partis la surveille par la route de Pontana pour reprendre Capoue. Du haut de la chaire, on leur avait promis la victoire. Ils ne doutaient pas que les murailles de Capoue ne tombassent devant eux, comme celles de Jéricho étaient tombées devant les Israélites.

Ces lazzaroni étaient ceux du petit môle et de Santa-Lucia.

Mais, en voyant cette foule soulever la poussière de la plaine qui dépasse Santa-Maria, et qui sépare la vieille Capoue de la nouvelle, Macdonald, resté Français, tout démissionnaire qu'il était, se mit comme volontaire à la tête de la garnison, et, tandis que, du haut des remparts, dix pièces de canon crachaient à mitraille sur cette foule, il fit deux sorties par les deux portes opposées, et, formant un immense cercle dont le centre était Capoue et son artillerie, et les deux ailes, son infanterie et sa fusillade, il fit un carnage horrible de toute cette multitude. Deux mille lazzaroni tués ou blessés restèrent sur le champ de bataille, couchés entre Caserte et Pontana. Tout ce qui était sain et sauf ou légèrement blessé s'enfuit et ne se rallia qu'à Casanuova.

Le lendemain, le canon se fit entendre dans la direction de Naples; mais, encore harassés de leur déroute de la veille, ils attendirent, en buvant, des nouvelles du combat. Le matin, ils apprirent que la journée avait été aux Français, qui avaient pris à leurs camarades vingt-sept pièces de canon, leur avaient tué mille hommes et leur avaient fait six cents prisonniers.

Alors, ils se réunirent à sept mille et marchèrent à toute course pour venir au secours des lazzaroni qui défendaient la ville, laissant sur la route, comme des jalons de carnage, ceux de leurs blessés qui, ralliés la veille et dans la nuit, n'eurent point la force de les suivre.

Arrivés au largo del Castello, ils se divisèrent en trois bandes. Les uns, par Toledo, portèrent secours au largo delle Pigne; les autres, par la strada dei Tribunali, au Castel-Capuano; les autres, par la Marina, au Marché-Vieux.

Couverts de poussière et de sang, ivres du vin qui leur avait été offert tout le long de la route, ils vinrent se jeter, combattants nouveaux, dans les rangs de ceux qui luttaient depuis la veille. Vaincus une première fois, accourant au secours de leurs frères vaincus, ils ne voulurent pas l'être une seconde. Tout républicain qui combattait déjà un contre six, eut un ou deux ennemis de plus à terrasser; et, pour les terrasser, il fallait non-seulement les blesser, mais encore les tuer; car, nous l'avons dit déjà, tant qu'ils leur restait un souffle de vie, les blessés s'obstinaient à combattre.

La lutte dura ainsi presque sans avantage jusqu'à trois heures de l'après-midi. Salvato, Monnier et Mathieu Maurice avaient pris le château del Carmine et le Marché-Vieux; Championnet, Thiébaut et Duhesme s'étaient emparés de Castel-Capuano et poussaient leurs avant-postes jusqu'au largo San-Giuseppe et le tiers de la strada dei Tribunali; Kellermann s'était avancé jusqu'à l'extrémité de la rue dei Cristallini tandis que Dufresse, après un combat acharné, s'était emparé de l'Albergo dei Poveri.

Il y eut alors une espèce de trêve due à la fatigue; des deux côtés, on était las de tuer. Championnet espérait que cette terrible journée, dans laquelle les lazzaroni avaient perdu quatre ou cinq mille hommes, serait une leçon pour eux et qu'ils demanderaient quartier. Voyant qu'il n'en était rien, il rédigea, au milieu du feu, sur un tambour, une proclamation adressée au peuple napolitain, et il chargea son aide de camp Villeneuve, qui avait repris ses fonctions près de lui, de la porter aux magistrats de Naples. En conséquence, il lui donna, comme parlementaire, un trompette avec un drapeau blanc. Mais, au milieu de l'effroyable désordre auquel Naples était en proie, les magistrats avaient perdu toute autorité. Les patriotes, sachant qu'ils seraient égorgés chez eux, se tenaient cachés; Villeneuve, malgré sa trompette et son drapeau blanc, partout où il se présenta pour passer, fut accueilli par des coups de fusil. Une balle brisa l'arçon de sa selle, et il fut obligé de revenir sur ses pas sans avoir pu faire connaître à l'ennemi la proclamation du général.

La voici. Elle était rédigée en italien, langue que Championnet parlait aussi bien que la langue française:

Championnet, général en chef, au peuple napolitain.

«Citoyens,

»J'ai pour un instant suspendu la vengeance militaire provoquée par une horrible licence et par la fureur de quelques individus payés par vos assassins. Je sais combien le peuple napolitain est bon, et je gémis du plus profond de mon coeur sur le mal que je suis forcé de lui faire. Aussi, je profite de ce moment de calme pour m'adresser à vous, comme un père ferait à ses enfants rebelles, mais toujours aimés, pour vous dire: Renoncez à une défense inutile, déposez les armes, et les personnes, la propriété et la religion seront respectées.

»Toute maison de laquelle partira un coup de fusil sera brûlée, et les habitants en seront fusillés. Mais que le calme se rétablisse, j'oublierai le passé, et les bénédictions du ciel pleuvront de nouveau sur cette heureuse contrée.

»Naples, 3 pluviôse, an VII de la République

(22 janvier 1799).»

Après la manière dont Villeneuve avait été accueilli, il n'y avait point d'espoir à garder, pour ce jour-là du moins. A quatre heures, les hostilités furent reprises avec plus d'acharnement que jamais. La nuit même descendit du ciel sans séparer les combattants. Les uns continuèrent à tirer des coups de fusil dans l'obscurité; les autres se couchèrent au milieu des cadavres, sur les cendres brûlantes et les ruines enflammées.

L'armée française, écrasée de fatigue, après avoir perdu mille hommes, tant tués que blessés, planta l'étendard tricolore sur le fort del Carmine, sur le Castel-Capuano et sur l'Albergo dei Poveri.

Comme nous l'avons dit, un tiers de la ville, à peu près, était en son pouvoir.

L'ordre fut donné de rester toute la nuit sous les armes, de garder les positions et de reprendre le combat au point du jour.

2Nous employons l'expression même du général Championnet.
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